Alors que la plupart des systèmes quantiques actuels fonctionnent à des températures proches du Zéro absolu, le nouvel ordinateur quantique optique de Xanadu prétend pouvoir fonctionner à température ambiante. L’entreprise promet aussi de doubler le nombre de Qubits tous les 6 mois !
Jusqu’ici, la startup canadienne Xanadu était surtout connue pour son kit de développement Strawberry Fields adapté au développement d’algorithmes quantiques pour ordinateurs quantiques optiques. Ils ont aussi développé un moteur de Deep Learning adapté à ce type de machines quantiques dénommé PennyLane et souvent présenté comme une sorte d’équivalent quantique à TensorFlow.
Un peu à la surprise générale, on a appris la semaine dernière non seulement que Xanadu disposait d’un prototype maison d’ordinateur quantique photonique mais que celui-ci était également d’ores et déjà accessible par le biais d’un service cloud QaaS (Quantum as a Service).
L’approche de Xanadu est très différente de celle de Google, IBM, Riguetti ou encore IonQ. Elle se démarque par deux innovations : les Qumodes, des Qubits s’appuyant sur des ondes permettant de réaliser des calculs analogiques avec des portes quantiques universelles, et un fonctionnement à température ambiante.
Une nouvelle piste prometteuse
Xanadu n’est pas une entreprise inconnue dans l’univers quantique même si elle était jusqu’ici restée relativement discrète. En juin 2019, la startup avait quand même levé 32 millions de dollars en Série A. En janvier 2020, elle recevait un nouvel investissement de 4 millions de dollars pour l’aider à concrétiser un service QaaS.
Les systèmes quantiques de Xanadu utilisent des « Qumodes », autrement dit des qubits basés sur des états compressés (squeezed states). Plutôt que de compter sur des circuits supraconducteurs, Xanadu utilise la photonique pour coder et traiter les informations quantiques.
Une séquence d’impulsions laser classiques est injectée dans la puce et couplée dans des micro-résonateurs, générant des états optiques spéciaux appelés états compressés. Ces états se composent d’une superposition quantique de différents nombres de photons et sortent des résonateurs via un ensemble de bus guides d’ondes. Ces états compressés se propagent ensuite dans un interféromètre composé d’un réseau de déphaseurs et de séparateurs de faisceau formant les portes quantiques.
Pour Xanadu, l’un des avantages de son approche photonique est de simplifier l’intégration des machines quantiques au sein de l’infrastructure réseau à base de fibre optique. La startup affirme qu’elle est ainsi en mesure de créer des infrastructures quantiques facilement extensibles avec un nombre toujours croissant de Qumodes assemblés en parallèle.
Cette approche commence à intéresser de plus en plus de startups explorant le potentiel du quantique (et du kit Strawberry Fields + PennyLane) notamment en matière de Machine Learning à l’instar des français de Prevision.io.
Du quantique à température ambiante ?
En théorie, les processeurs quantiques photoniques de Xanadu peuvent opérer à température ambiante. « Parce que les photons que nous utilisons ont une énergie comparativement élevée (0,8 eV, environ 20000 fois plus grande que l’énergie correspondante dans les circuits supraconducteurs), les chances qu’un photon parasite d’origine thermique se glisse dans nos circuits photoniques et perturbe le calcul sont extrêmement faibles, même à des températures ambiantes autour de 25°C comme celles d’un laboratoire ou un centre de données » explique les ingénieurs de Xanadu.
Mais il y a un hic. En pratique, le système de Xanadu dépend encore d’un composant cryogénique. En sortie de processeur, Xanadu utilise des détecteurs spécialisés de comptage de photons (TES) qui lisent les états quantiques des faisceaux de lumière intriqués. Malheureusement, ces détecteurs fonctionnent à des températures cryogéniques. L’affirmation selon laquelle « les ordinateurs quantiques photoniques fonctionnent à température ambiante» doit donc être nuancée: la puce elle-même se trouve à température ambiante, mais un refroidissement cryogénique est encore aujourd’hui nécessaire pour les détecteurs photoniques.
Reste que Xanadu espère lever cette limitation à moyen terme. L’entreprise affirme qu’elle pourra d’ici quelques années pouvoir utiliser ses processeurs dans un rack serveur standard. « Et la photonique nous permet également de pousser la miniaturisation encore plus loin, au point où l’incorporation de puces quantiques dans les ordinateurs personnels devient concevable. Cela n’arrivera pas demain, car d’autres développements sont d’abord nécessaires. Mais un tel développement a déjà commencé et reste un objectif majeur de l’équipe » expliquent les responsables de Xanadu.
Xanadu Quantum Cloud platform
Pour permettre à ses partenaires, aux chercheurs et aux futurs clients d’accéder à ses machines quantiques, Xanadu vient de lancer un service QaaS dans le cloud. La plateforme Xanadu Quantum Cloud permet d’accéder à distance à des machines Xanadu équipées de 8 qubits (et 4 niveaux de portes quantiques) et de 12 qubits (et 6 niveaux de portes quantiques). Une version 24 qubits serait également en préparation. La startup ambitionne de doubler la capacité de ses machines tous les six mois !
Tout ceci est très prometteur mais reste encore un peu flou. Xanadu ne précise pas les caractéristiques précises de ses qubits « utilisables », notamment en termes de fidélité. De même, Xanadu ne donne aucune idée de performance et ne précise pas de « Volume Quantique », un indice qui n’est pas basé sur le seul nombre de qubits mais intègre plusieurs autres caractéristiques comme leur stabilité et qui désormais adopté par des acteurs comme IBM ou Honeywell.
L’arrivée de Xanadu est néanmoins une nouvelle étape vers une plus grande accessibilité de l’informatique quantique.