Quand les attaques deviennent inévitables, la résilience prend le relais : micro-segmentation, automatisation et pilotage global du risque ouvrent la voie à un Zero Trust opérationnel et durable. L’enjeu : garantir la continuité, même sous pression, et stopper les attaques nettes avant propagation.
L’époque où la cybersécurité visait à empêcher toute intrusion est révolue. L’expérience terrain, les retours d’incident, et les analyses convergent : l’attaque est devenue inévitable.
La vraie question n’est plus : « Serons-nous attaqués ? », mais : « Comment notre organisation réagira-t-elle une fois qu’elle le sera ? »
La cyber résilience devient alors l’objectif prioritaire. Être résilient, c’est continuer à fonctionner même sous attaque, c’est absorber le choc, l’isoler, l’endiguer, et préserver l’essentiel. Et c’est précisément ce que permet une stratégie Zero Trust bien pensée.
Renforcer la résilience grâce au Zero Trust
Adopter une posture Zero Trust ne signifie pas seulement multiplier les contrôles d’accès. C’est surtout changer d’état d’esprit : accepter l’idée qu’une attaque réussira tôt ou tard, et se doter des moyens pour limiter son impact. C’est là qu’intervient la notion de cyber résilience.
La résilience, c’est la capacité à encaisser une attaque, à en contenir l’impact, et à se rétablir rapidement. Ce n’est pas la promesse d’un monde sans faille, mais d’un système capable de limiter les dégâts et d’assurer la continuité.
Le Zero Trust est indissociable d’une logique de cyber résilience. Identifier, cloisonner, détecter et isoler : ce sont les quatre leviers sur lesquels s’appuie la défense moderne.
Le Zero Trust, une démarche transverse
Face à la dépérimétrisation du système d’information, à la multiplication des fournisseurs, au télétravail, au cloud, et à l’explosion des exigences réglementaires (RGPD, NIS2…), le Zero Trust devient un langage commun pour gérer le risque numérique à l’échelle de l’organisation.
Le livre blanc du CESIN x Forum InCyber intitulé « Zero Trust, le nouveau paradigme » insiste sur un point : sans impulsion et volonté du COMEX, la stratégie Zero Trust risque d’échouer.
Ainsi, le Zero Trust est une démarche transverse, impliquant la direction générale et non seulement la DSI. Souvent perçu à tort comme un sujet purement technique, réservé aux experts cybersécurité ou à la DSI, le Zero Trust est un projet d’entreprise à part entière – stratégique, organisationnel et culturel.
Le Zero Trust nécessite une remise à plat des usages numériques, des processus internes, des rôles métiers et des relations avec les partenaires. En ce sens, le Zero Trust impacte les RH, les achats, le juridique, les directions opérationnelles… bien au-delà des équipes IT.
La micro-segmentation : élément indispensable d’une stratégie Zero Trust
Le modèle du Zero Trust doit s’inscrire dans une démarche de résilience organisationnelle. Cette approche consiste à anticiper la compromission, à réduire la surface d’attaque, et surtout à limiter la propagation interne en cas de faille.
C’est ici que la micro-segmentation prend tout son sens. Car une attaque n’a jamais besoin de « tout » compromettre. Elle cherche un point faible, puis se propage par rebond. Et c’est justement cette capacité de propagation qui fait la gravité d’un incident.
La micro-segmentation est sans doute l’élément le plus important d’une architecture Zero Trust. Elle vise à cloisonner les flux réseau entre charges de travail (applications, serveurs, terminaux…), afin de limiter la surface d’attaque et d’empêcher la propagation latérale en cas de compromission.
Pour réussir, la clé réside dans une démarche progressive, rationnelle, ancrée dans les réalités techniques et humaines de l’organisation. Cette approche n’est pas un signe de prudence excessive : c’est une condition de succès.
Une mise en œuvre progressive
Les organisations qui mettent en œuvre la micro-segmentation doivent débuter par le ciblage des périmètres les plus critiques, là où les risques sont les plus élevés : serveurs exposés, données sensibles, environnements tiers. Le CESIN insiste également sur les zones avec des utilisateurs privilégiés ou en fonction de l’accès internet.
Ce choix stratégique permet d’obtenir un impact rapide tout en limitant les perturbations.
Mais pour segmenter efficacement, il est essentiel de disposer d’une cartographie claire des flux. Cette visibilité permet de comprendre les communications réelles au sein du système, d’identifier les interdépendances et d’éviter les erreurs de configuration.
Dans un premier temps, il est recommandé de déployer les politiques en mode observation, pour tester les règles sans impacter la production. Cela permet d’ajuster progressivement les paramètres et d’instaurer un climat de confiance.
Enfin, la segmentation doit être pensée comme un processus évolutif, capable de s’adapter aux changements du système d’information. L’automatisation devient donc un levier indispensable pour maintenir une sécurité efficace dans un environnement en constante mutation.
La plus grande erreur des organisations en matière de Zero Trust et de micro-segmentation est souvent de vouloir aller trop loin, trop vite. Or, une mise en œuvre progressive a un mérite souvent négligé : elle permet de démontrer rapidement des résultats et d’initier les équipes pour une prise en compte évolutive. Réduction des flux superflus, meilleure visibilité, premières anomalies détectées ou bloquées… Ces preuves concrètes nourrissent la dynamique du projet, rassurent les métiers, et permettent d’embarquer plus largement.
La micro-segmentation n’est pas un objectif en soi : c’est un levier pour construire une architecture résiliente, capable de contenir une menace sans que toute l’organisation ne soit paralysée. Y aller progressivement, c’est s’assurer d’y aller durablement.
La mise en œuvre progressive d’une stratégie de micro-segmentation, telle que recommandée dans le livre blanc du CESIN, est la clé pour construire une sécurité réseau moderne, contextualisée et résiliente. En priorisant, en observant, en automatisant grâce à des outils modernes basés sur des graphes de sécurité de l’IA, et en capitalisant sur les premiers résultats, les organisations peuvent voir et comprendre plus facilement toutes les connexions et tous les risques dans leurs environnements, afin d’avancer avec méthode vers une architecture Zero Trust opérationnelle et durable.
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Par Damien Gbiorczyk, expert cyber résilience Illumio