La révolution numérique s’empare de l’administration française avec l’expérimentation de l’IA générative, une stratégie visant à renforcer les services publics par une meilleure réactivité et une personnalisation des réponses aux usagers.

Loin de son image surannée, l’administration française a lancé en octobre 2023 une expérimentation de l’IA générative pour répondre aux questions de ses usagers. Avec l’objectif de “transformer les interactions entre les administrations et les usagers”, selon les mots du ministère de la Transformation et de la Fonction Publiques. Une façon de combler le fossé qui s’est creusé entre les services publics et les Français d’après le Conseil d’Etat.

En effet, pour l’institution publique, « l’intelligence artificielle devrait permettre de renforcer la relation humaine entre le citoyen et l’agent public en dégageant du temps grâce à l’automatisation de certaines tâches (accusés de réception, demande de documents supplémentaires, etc.) et d’améliorer la qualité du service par l’accomplissement de tâches jusque-là matériellement impossibles ».

On ne peut que se féliciter de ce crédo. Car si l’on considère la masse considérable de données générée par les divers services publics d’un pays, on peut se dire, sans risque de se tromper, qu’il existe là, un champ fructueux pour l’IA générative.

L’administration, le terrain de jeu idéal de l’IA générative

Évidemment, l’intelligence artificielle générative, capable de créer de nouveaux contenus à partir d’une base de connaissance, n’est pas magique. Des outils comme ChatGPT sont victimes d’hallucinations, notamment à cause de la qualité des données d’entraînement.

En revanche, elle est suffisamment riche pour imaginer de meilleurs services aux administrés. Ses atouts pour les administrations peuvent se résumer ainsi : personnalisation des services, précision des investigations et amélioration de la productivité du personnel.

Lorsque les agences de l’Etat intègrent leurs propres données à l’intelligence artificielle générative, un usager peut trouver plus facilement des informations et instructions adaptées à sa situation. Imaginons qu’une personne souhaite bénéficier d’un logement social. Renseigner des informations génériques sur une page web devient vite complexe et ne correspond probablement pas à la situation unique de la personne concernée. En revanche, en mettant à disposition tout le savoir-faire de l’intelligence artificielle générative, une personne pourrait trouver des informations et instructions adaptées à sa situation. Ce type d’informations pertinentes peut réduire la complexité qui empêche souvent les personnes d’accéder à des services essentiels.

Les moteurs de recherche des différentes antennes administratives permettent aux fonctionnaires de trouver des réponses à partir de différents types et sources de données, à l’aide d’une seule requête. Mais grâce à une IA générative qui lit la documentation en quelques secondes, les fonctionnaires bénéficient d’une réponse en langage naturel avec les informations pertinentes nécessaires à la poursuite de leur tâche. Leur productivité s’en trouve ainsi améliorée !

En effet, une requête rapide à travers de multiples ensembles et formats de données peut fournir des informations pertinentes en temps réel – évitant ainsi d’avoir à parcourir laborieusement (et de façon fastidieuse) des documents ou des bases de données cloisonnées. C’est le cas, par exemple, lorsqu’un fonctionnaire recherche des informations sur des prestations ou des obligations spécifiques à son poste. Au lieu d’avoir à chercher l’information partout, l’intelligence artificielle générative donne une réponse en langage naturel adaptée à son cas particulier.

Préalables à l’IA générative au sein de la fonction publique

D’un point de vue technique, lorsqu’une administration envisage d’intégrer ses données à une solution d’intelligence artificielle générative, elle doit s’assurer que la plateforme choisie ingère tous les types de données, les stocke d’une manière économique et peut y accéder indépendamment de leur emplacement.

Elle se donne ainsi les moyens de bénéficier de réponses fondées sur des faits pertinents pour sa mission, et pas sur des hallucinations ; d’éviter de devoir réentraîner de façon répétitive des grands modèles de langage à l’aide de ses données internes (un gain de temps et d’économie en matière d’entraînement) ; et d’améliorer la sécurité de ses données en limitant leur accès à des fonctions spécifiques au sein de la structure, tout en restant en mesure de mener des recherches dans l’ensemble du datastore.

La valeur que l’IA générative peut apporter à une administration comme à une entreprise dépend de ses données, mais aussi de leur caractère unifié et de leur accessibilité. Si ces informations sont dispersées dans plusieurs outils et au sein de diverses équipes, elle ne disposera peut-être pas du contexte et du contenu dont elle a besoin pour que l’intelligence artificielle générative soit hautement pertinente pour les objectifs de sa mission.

Gageons que l’expérimentation menée par l’Administration française respecte ces fondamentaux. C’est à ce prix qu’elle sera couronnée de succès.
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Par Yannick Fhima, Directeur, Enterprise Data Solutions, Europe du Sud chez Elastic

 

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