Selon la dernière étude GP Bullhound, les entreprises du logiciel et particulièrement celles ayant adopté une approche SaaS seraient suffisamment résistantes pour faire face à la crise…

Personne ne l’ignore, la pandémie du Covid-19 n’est pas qu’une crise sanitaire. Elle s’accompagne d’une crise économique d’envergure engendrée par le confinement des salariés et des clients.

La dernière étude internationale de GP Bullhound (une société de conseils et d’investissement) se veut assez rassurante pour l’industrie du logiciel et des services SaaS même si elle montre de grandes disparités selon les secteurs.

Des impacts à long terme…

Pour GP Bullhound, cette crise du Covid-19 va avoir une multitude d’impacts sur les entreprises et sur l’industrie du logiciel. Les auteurs de l’étude notent notamment :

* Que les dirigeants des éditeurs de logiciels et services vont devoir se focaliser sur ce qui importe réellement aux clients et mesurer avec davantage d’assiduité les taux d’utilisation et d’engagement pour choisir les bons combats !

* Les forces de ventes de ces éditeurs vont devoir revérifier tous les contrats clients pour analyser les clauses de sortie et les dates de renouvellement. GP Bullhound prévient les éditeurs : « Alors que l’attention va se focaliser sur les coûts d’exploitation, les produits à faible valeur ou à faible utilisation vont avoir la vie dure et être confrontés à des taux de désabonnement très élevés dans les prochains mois ».
Selon GP Bullhound, les solutions de contrôle des dépenses et des taux d’utilisation comme celles de Cleanshelf, Coupa ou ServiceNow vont avoir le vent en poupe et vont se révéler des outils précieux pour les entreprises clientes.

* Sans surprise, le cabinet de conseil constate que les éditeurs de logiciels verticaux qui sont positionnés sur des industries stables et croissantes (comme les services gouvernementaux ou la santé par exemple) se porteront bien mieux que ceux axés sur les industries les plus touchées par la crise comme l’hôtellerie et la vente au détail.

* Certaines solutions ont rencontré un succès sans précédent durant cette crise. Notamment toutes les solutions facilitant la collaboration, le travail à distance et la visioconférence. DocuSign, Microsoft Teams, Slack et Zoom sont les grands vainqueurs de cette période difficile. Mais la demande va partiellement s’essouffler après la crise sanitaire et le déconfinement. « Elle demeurera toutefois élevée car une certaine transition vers une économie plus mobile et un mode de vie moins éphémère va se maintenir pendant les années à venir » notent les responsables de l’étude. Il note au passage que la sécurité et l’infrastructure back-end seront essentielles pour maintenir une productivité de qualité.

* Ils constatent que, comme en 2008-2009, les grands fournisseurs de cloud continueront de dominer le marché et d’embaucher.

Mais si GP Bullhound reconnaît d’importantes disparités selon les secteurs d’activité, le cabinet de conseil estime quand même que cette crise aura des effets de bord positifs sur toute l’industrie de la Tech et du logiciel. Pour lui, « nous avons assisté ces dernières années à un virage à long terme des entreprises vers une plus grande flexibilité de la main-d’œuvre vers l’adoption de technologies digitales pour accroître l’efficacité, avec des progrès qui diffèrent énormément selon l’industrie. Cependant, le besoin soudain des entreprises d’adopter le télétravail et les technologies numériques à cause de Covid-19 aura un impact permanent sur leur effectif et sur leur portfolio technologique et logiciel, un changement qui va s’accélérer dans toutes les industries. Dans l’ère Post-Covid, les collaborateurs, quels que soient les secteurs, seront beaucoup plus tributaires des logiciels et continueront de tirer parti des nouvelles économies et de la flexibilité qu’ils ont trouvées ».

Une adoption du paiement à l’usage

Pour GP Bullhound, la crise va accélérer une demande de souplesse des entreprises dans les paiements et les licences. Les entreprises vont veiller à ne pas brûler leur capital.
Même les offres SaaS, et plus encore celles qui ne le sont pas, vont devoir offrir de multiples options tarifaires et de la souplesse. Si le « Pay per Use », autrement dit le paiement à l’usage effectif des services et ressources, était jusqu’ici perçu comme un facteur différenciant, il va s’imposer comme une nécessité impérative aux yeux des clients.

Une accélération de l’adoption de la RPA et de l’IA

L’IA et la RPA étaient déjà clairement perçues comme des technologies clés avant la crise. Elles vont l’être encore plus après.
Pour GP Bullhound, « L’acquisition de talents en IA et des technologies d’IA devrait encore s’accélérer et devenir l’un des principaux moteurs de la vente de logiciels ». De même, les éditeurs et ESN sont aujourd’hui en recherche d’acquisition de technologies IA et startups IA à même d’être immédiatement exploité dans leurs logiciels et services afin d’offrir de la valeur ajoutée à leurs clients.
Pour GP Bullhound, les exemples à suivre se nomment Google, LinkedIn, Microsoft et SalesForce.
Dans un même ordre d’idées, la RPA n’est plus l’apanage d’entreprises très focalisées sur la technologie et trouve sa place sur des marchés très verticaux comme la santé, le juridique, etc. La crise va contribuer à accélérer l’automatisation des processus. Ce principe va de pair avec un monde où le télétravail est renforcé et où les entreprises ont besoin de gagner encore en efficacité et en agilité. Selon le cabinet de conseil, « en 2020, les entreprises chercheront à combiner davantage de logiciels pour élargir la portée des tâches qui peuvent être accomplies à l’aide de RPA ».
AutomationAnywhere, Blue Prism, Olive, UI Path et Microsoft vont profiter de cette appétence pour davantage de RPA.

Au final, l’étude montre que la crise aura un impact global sur toutes les entreprises, y compris sur celles de l’univers du logiciel. Même si ces dernières seront globalement moins impactées, à condition qu’elles ne soient pas spécialisées (verticalisées) sur l’un des secteurs les plus sévèrement touchés par la crise (comme l’industrie de l’hôtellerie, des voyages ou du retail). La crise offrira aussi des opportunités à certains éditeurs d’investir ou de se faire racheter. Avec comme secteurs clés, l’IA et la RPA, mais aussi les solutions de contrôle des dépenses et des usages, la cybersécurité, le télétravail et la collaboration. On peut ainsi s’attendre à des fusions-acquisitions et des consolidations post-crise dans l’univers des solutions logicielles d’entreprises.
Reste que l’étude est très focalisée sur l’univers des logiciels et services en provenance des USA. En France, l’association Tech In France‘ s’alarmait il y a quelques jours de voir les entreprises clientes renégocier les contrats logiciels et mettre la pression sur les fournisseurs de solutions et de services informatiques en invoquant le motif de « force majeure ». Le Cigref et le Syntec Numérique avaient eux aussi réagi en lançant un appel à la compréhension mutuelle et à la solidarité professionnelle notamment envers les entreprises les plus fragiles du secteur. Ils rappelaient que « les conséquences de la crise sanitaire et économique actuelle peuvent s’avérer lourdes, voire dramatiques, chez de nombreux prestataires, éditeurs de logiciels, entreprises de services numériques ou de conseil en technologies ».


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