Les usages de l’intelligence artificielle se diversifient avec l’apparition de nouvelles techniques et de nouvelles générations de réseaux de neurones. Au point que l’IA peut désormais se montrer créative. Exemple avec la musique…

Depuis l’Atari ST et ses prises Midi intégrées, les ordinateurs assistent les musiciens dans le travail d’enregistrements des pistes musicales et le séquencement des morceaux. Mais ils n’interviennent pas véritablement dans la composition des titres qui enchantent nos oreilles.

En 1990, Jean-Michel Jarre lançait son album « En attendant Cousteau ». Grande originalité pour l’époque (si l’on omet l’utilisation des Steel Drums sur Calypso), le disque comporte un titre éponyme de 45 minutes en partie composé à l’aide d’un logiciel sur Atari ST dénommé AMI (Algorithmic Musical Instrument) et générant des notes depuis des gammes paramétrées préalablement. C’est la première fois qu’un ordinateur participait activement à la composition d’un morceau. Mais à cette époque, l’intelligence créative et musicale reposait sur des algorithmes très mathématiques et une bonne part de génération de notes aléatoires.

Aujourd’hui, ce ne sont plus des algorithmes mais des réseaux de neurones qui s’attaquent à la création musicale. L’IA fait son entrée dans l’univers de la création musicale. L’intelligence artificielle excelle déjà à créer des paysages sonores et des ambiances sonores. Des services comme Spotify, Amazon Music ou Google Music adaptent les playlists à votre humeur ou aux ambiances que vous voulez créer.

Lors du dernier AWS Re:invent en novembre dernier, Amazon avait surpris son public en démontrant un drôle de synthétiseur boosté à l’IA Générative, Amazon DeepComposer. C’est à la fois un outil de création musicale qui « imagine » un morceau avec tous les accompagnements à partir de quelques notes jouées au clavier et un outil pour découvrir les fonctionnements du Deep Learning et des IA Génératives.

La toujours très imaginative et ludique startup OpenAI a développé une IA similaire « MuseNet » qui génère des morceaux de 4 minutes en jouant de 10 instruments différents et se permet de mélanger et combiner différents styles de musiques qu’elle a préalablement appris, de Mozart aux Beatles en passant par la country ou le Jazz. Elle a appris à découvrir les schémas d’harmonies, rythmes et styles à partir de centaines de fichiers MIDI. Il suffit de lui donner 6 notes de départ, et elle « improvise » ensuite. Quitte à mixer du Piano à la Chopin avec des accompagnements basse et guitare insolites mais pas nécessairement harmonieux (cf ce morceau).
Dans un même ordre d’idées, l’université de technologie de Bombay a également développé une IA capable de créer des compositions originales dans le plus pur style de la musique classique indienne.
L’artiste de K-Pop Skygge, avatar du musicien et producteur Benoit Carré, a utilisé une technologie du labo de recherche de Spotify (labo dirigé par le guru français de la musique développée par l’IA, François Pachet) pour son EP « American Folk Songs ».

En décembre dernier, Microsoft annonçait un partenariat avec KKBox, un service de streaming taïwanais. Outre l’hébergement dans Azure, le partenariat comprend le développement d’un modèle prédictif capable d’anticiper le succès commercial d’une chanson.
Et cette semaine, l’entreprise dirigée par Satya Nadella a annoncé une nouvelle expérimentation avec l’artiste islandaise Björk : l’IA créée par Microsoft compose des musiques en fonction de l’évolution des nuages dans le ciel ainsi que du passage des avions et des oiseaux. Pour cela l’IA s’appuie sur de nombreux arrangements choraux créés par Björk.

Autant d’expériences sonores et musicales qui démontrent que les usages de l’IA se multiplient dans tous les domaines y compris créatifs. De quoi inspirer les décideurs en entreprise qui, selon une récente étude IFS, restent pour plus de 75% d’entre eux ignorants du potentiel de l’IA, de ses technologies, de ses enjeux et de ses risques.