Le rachat d’Enterasys par le fabricant de commutateur Extreme marque la fin d’un des derniers survivants des années folles des réseaux. C’est un peu la deuxième mort du fabricant Cabletron, symbole des premiers réseaux Ethernet 10 base-T.
De la révolution IP, les survivants des années 90 sont rares.
Enterasys faisait jusque là partie de ces rares survivants. Cette filiale succédait en fait à Cabletron, un poids lourds du secteur qui réalisait en 1996 plus d’un milliard de dollars de chiffre d’affaire. Sa filiale paraissait avoir parfaitement réussi à maitriser les révolutions techniques introduites par l’avènement d’Internet. La firme, au-delà du rachat d’ailleurs, va continuer au travers de ses logiciels, utilisées par des dizaines de milliers de commutateurs. Ceux-ci seront portés sur les boitiers d’Extrême Networks.
Pour revenir à la période faste de Cabletron, il faut rappeler qu’à la fin des années 80, le marché des réseaux était largement divisé par les protocoles de tous poils. Chaque constructeur réseau trouvait dans sa niche, les marges nécessaires pour bien vivre. Que ce soit dans les télécoms avec l’ATM, le RNIS, le Frame Relay ou dans les réseaux locaux où l’Ethernet a fini par dominer, le Token Ring, le FDDI et même Arcnet, tout était ouvert. Après, les environnements concurrents se sont dévorés, combinés, restructurés et l’IP le protocole roi a fait table rase des différences entre protocoles. Cela a permis une uniformisation et une chute incroyable des tarifs. A titre d’exemple, les commutateurs basiques 8 ports 1 Gigabits Ethernet vendus en 1995, l’équivalent de 10 000 euros, se vendent moins de 100 euros cette année.
La plupart des riches spécialistes des réseaux d’entreprises face à cette dégringolade fulgurante des prix, ont du se vendre à plus gros qu’eux, laissant la place aux géants qui en fournissant les groupes industriels et les opérateurs (Cisco, Juniper, Alcatel, Ericsson) conservaient encore des revenus considérables. Même les chinois qui fournissaient en sous traitance (en OEM), l’industrie essentiellement américaine des réseaux, (Dlink, Zyxel, etc.) commencent à végéter et seuls Huawei et ZTE grâce à l’appui du gouvernement chinois à leurs débuts et aux opérateurs désormais ont pu devenir des monstres planétaires.
De la gestion de caches à la recherche de cash
Si Cabletron crée en 1983 avait divisée en quatre sociétés spécialisées en 2000 au plus fort de la bulle internet , sa seule structure survivante , Enterasys était centrée sur l’Ethernet et IP et depuis 2003 sur le Wifi . Cette intégration d’internet aux réseaux locaux, Cabletron l’avait déjà maitrisée dés les années 90.
Sa filiale Enterasys s’est donc maintenue 13 ans de suite tout en étant racheteé par des fonds d’investissements en 2005. Revendue 180 millions de dollars à Extreme alors que la firme avait été rachetée 386 Millions de dollars, il y a huit ans, on pourrait estimer que le fond Gores group a fait une mauvaise affaire. La vente s’effectuant en cash et les achats précédents s’étant effectués avec d’autres fonds par échanges d’action, on peut se poser la question. Mais c’est une véritable remise à plat des investissements. Enterasys, le dernier des mohicans a donc rejoint la légion des entreprises stars des années 90, noyées dans le raz de marée de la globalisation.
Les Ex gloires des Nineties, que sont elles devenues ?
Foundry, 3com, Bay, ces grands concurrents de Cabletron (voir la liste non exhaustive ci dessous) tous sont passés à la moulinette des autres géants.Tous les grands fabricants ont poursuivi les méthodes utilisées par Cisco pour croitre. Racheter des leaders de niches pour conquérir de nouveaux clients et réduire les frais de fonctionnement en sous traitant au maximum, quitte à devenir une « entreprise fabless », sans usine à l’instar d’Alcatel. La trajectoire du français tient essentiellement aux choix de son patron Serge Tchuruk qui entre 1995 et 2007, est devenu le véritable Attila des réseaux. Mais après avoir jeté par dessus bord tout ce qui était possible, usines et employés, pour diminuer les frais, il ne reste qu’un périmètre comparable à sa taille des années 90. Pourtant le fantasme du rachat de Lucent, premier constructeur mondial pendant des années bien avancé dans les années 2000 s’est finalement transformé en fusion en 2006. La firme pilier du CAC 40 qui a réalisé 12 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2012 continue de serrer les boulons en fermant des usines.
Bref la mondialisation et l’uniformisation des réseaux ne sont pas finies et la virtualisation des réseaux qui simplifie les infrastructures va encore révolutionner ce marché toujours bouillonnant.
QUE SONT ELLES DEVENUES ?
– 3 Com racheté par HP en 2007
– Grand Junction racheté par Cisco en 1992
– Bay networks racheté par Nortel en 1998
– Wellfleet et synoptic fusion pour créer Bay Networks en 1994
– Kalpana racheté par Cisco en 1992
– DSC :racheté par Alcatel en 1998
– Xylan: racheté par Alcatel en 1999
– Packet engine racheté par Alcatel en 1999
– Newbridge : le canadien spécialiste de l’ATM racheté par Alcatel en 2000
– Lucent : Fusion avec Alcatel en 2006
– Newbridge : le canadien spécialiste de l’ATM racheté par Alcatel en 2000
– Siemens Networks Fusion avec Nokia en 2007
– Redback Networks ( routeurs d’opérateurs) racheté par Ericsson en 2007
– Marconi Networks (équipements d’opérateurs) racheté par Ericsson
– Telcordia racheté par Ericsson en 2007
– Scientific Atlanta racheté en 2005 par Cisco
– Stratacom racheté par Cisco en 1996 pour 4 milliards
– Webex en 2007 racheté par Cisco en 2007
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