Honeywell annonce cette semaine avoir construit le plus puissant ordinateur quantique, à base d’ions piégés, doublant les performances des plus puissantes machines quantiques actuelles d’IBM ou Google.
À la fin de l’année dernière, lors de sa conférence MS Ignite, Microsoft annonçait son service d’informatique quantique dans le nuage (QaaS, Quantum as a Service), Azure Quantum. Ce dernier permet aux chercheurs et aux entreprises d’accéder à des algorithmes quantiques préfabriqués, à des frameworks de développement quantique, à des simulateurs quantiques mais aussi à du véritable hardware quantique. Et si dans la liste des partenaires de machines quantiques exposées par le service on retrouvait des acteurs en vue comme IonQ et QCI, le nom d’Honeywell avait surpris bien des observateurs même si l’entreprise n’avait pas caché son intérêt pour le sujet depuis 2018 et l’annonce d’un programme de recherches.
Le fabricant est certes plus connu pour ses technologies aéronautiques et spatiales mais ses activités s’étendent à l’industrie du logiciel, des systèmes embarqués, de la détection des gaz, de la recherche pharmaceutique, etc.
La publication d’un papier de blog cette semaine confirme désormais qu’Honeywell compte aussi jouer les premiers rôles dans l’univers de l’informatique quantique.
Alors que les startups du quantique comme Rigetti ou IonQ font tout pour attirer l’attention depuis plusieurs années, Honeywell a adopté une démarche inverse travaillant dans le secret le plus absolu.
Aujourd’hui, le constructeur affirme disposer du plus puissant ordinateur quantique au monde ! Il s’appuie sur une technologie d’ions piégés (Ion Trap), une piste également suivie par IonQ et qui permettrait, selon Honeywell et IonQ, d’offrir des temps de cohésion des informations quantiques bien plus longs que celui des machines à supraconducteurs d’IBM ou Google par exemple. Une étude de Princeton avait d’ailleurs montré en 2019 que la machine à ions piégés d’IonQ donnait des réponses juste 90% du temps là où celle d’IBM ne donnait une réponse exacte que 50% du temps.
Honeywell n’a pas dévoilé le nombre de Qubits de sa machine. Mais elle a en revanche dévoilé son indice de « volume quantique ». Les études de Princeton, de l’ORNL ou encore d’IBM ont démontré que la simple information du nombre de Qubits ne permettait pas de juger convenablement de la puissance des machines quantiques. D’autres paramètres sont à prendre en compte comme la durée de survie des informations quantiques, le nombre d’opérations pouvant être réalisées, la fiabilité des résultats obtenus, le niveau de parallélisation des portes quantiques, le niveau de cohérence, etc…
C’est pourquoi, contrairement à Google et Rigetti qui se focalisent sur les Qubits, IBM préfère utiliser un indice dénommé « Quantum Volume » qui combine 11 caractéristiques.
En janvier dernier, lors du CES 2020, IBM s’enorgueillissait de doubler son volume quantique tous les ans et d’atteindre désormais un Volume Quantique de « 32 » avec son nouveau IBM Q System « Raleigh » (à 28 Qubits supraconducteurs).
Honeywell annonce que son premier ordinateur quantique, qui devrait être réellement accessible à partir de la mi-2020 via Azure Quantum, atteint un volume quantique de « 64 » soit le double de la dernière machine quantique d’IBM. Sans rien dévoiler des avancées scientifiques qui lui permettent d’atteindre ce résultat, Honeywell affirme avoir développé une technologie révolutionnaire (« breaktrough ») lui permettant non seulement de proposer aujourd’hui l’ordinateur quantique le plus puissant mais également de rapidement itérer pour continuer de monter en puissance.
« Tout commence avec notre héritage Honeywell », explique Tony Uttley, président de Honeywell Quantum Solutions à nos confrères de TechCrunch. « Avec nos activités dans l’aérospatiale et la défense mais aussi dans le pétrole et le gaz, nous disposions déjà de toutes les pièces sous-jacentes pour fabriquer un ordinateur quantique. »
Pour accélérer l’adoption de l’informatique quantique et explorer ses applications pratiques, Honeywell Ventures (la branche d’investissement de la firme) annonce avoir investi dans deux fournisseurs d’outils logiciels quantiques : Cambridge Quantum Computing (CQC) et Zapata Computing. Honeywell annonce également un partenariat avec JPMorgan Chase pour développer des algorithmes quantiques adaptés à sa machine.
On attend désormais les réactions de Google, Rigetti et Microsoft dont on n’a pas de nouvelles depuis plusieurs mois quant à leurs avancées technologiques dans les machines quantiques (si l’on omet l’annonce contestée de suprématie de Google qui bien que publiée en novembre date en réalité de l’été 2019). En attendant, l’Europe semble continuer à prendre du retard. Il va falloir accélérer la mise en place des propositions du rapport Forteza.