L’Arcep (Autorité de Régulation des Communications électroniques et des Postes) a récemment dévoilé au gouvernement son cahier des charges concernant l’attribution des fréquences 5G aux opérateurs français pour un début de déploiement en 2020. L’apparition de la 5G dans le paysage numérique va ouvrir la voie à de nouvelles opportunités et de nouveaux usages. L’architecture des réseaux va devoir être adaptée à ces hauts débits, avec une conséquence directe sur les Data Centers supportant l’essentiel du volume des données générées par l’Internet mobile. En effet, selon une étude réalisée par Cisco (Global Mobile Data Traffic Forecast Update), le trafic mondial de données mobiles devrait être multiplié par sept et augmenter presque deux fois plus vite que le trafic IP fixe entre 2017 et 2022. En pleine croissance, ce segment a bénéficié de plusieurs avancées dans le câblage par fibre optique. Cet article explore les principales raisons de la croissance de l’Internet mobile et met l’accent sur les nouvelles technologies visant à faciliter le travail des installateurs.

Les bonnes pratiques en matière de conception et de déploiement d’interconnexions de Data Centers à densité extrême

Une recherche rapide sur Internet pour le montant des dépenses allouées aux Data Centers à grande échelle ou multi-tenant renvoie à plusieurs plans d’expansion, totalisant des milliards de dollars. Mais qu’est-ce que ce genre d’investissement offre ? Souvent, la réponse à cette question est un campus de Data Centers qui se compose de plusieurs salles de données, réparties dans des bâtiments séparés, souvent plus grands qu’un terrain de football où circulent plus de 100 Tbps de données (Figure 1).

Figure 1. Exemple d’aménagement d’un campus de Data Centers.

Sans trop s’attarder sur les détails des raisons pour lesquelles ces Data Centers sont de plus en plus grands, nous pouvons résumer la situation autour de deux tendances : la première est que la croissance exponentielle du trafic Est-Ouest de la communication machine-to-machine est en cours de création. La deuxième tendance est liée à l’adoption d’architectures de réseau plus horizontales, telles que les réseaux spine-and-leaf ou clos. L’objectif est d’avoir un seul, grand et unique réseau sur le campus, entraînant un besoin de 100 Tbps de données (ou plus) entre les bâtiments.

Comme on peut l’imaginer, construire à cette échelle présente des défis uniques que ce soit au niveau de l’alimentation, du refroidissement ou de la connectivité pour interconnecter les équipements. Sur ce dernier point, de multiples approches ont été évaluées pour fournir des débits de transmission à 100 Tbps (ou plus) mais le modèle dominant s’avère être la transmission à des débits plus faibles sur de nombreuses fibres monomodes. Il est important de noter que ces longueurs sont souvent de 2 à 3 km, voire moins. La modélisation montre que des débits de données plus faibles sur un plus grand nombre de fibres demeurera l’approche la plus rentable pendant au moins quelques années. Cette modélisation des coûts permet d’expliquer pourquoi l’industrie investit autant d’argent dans le développement de câbles à haute densité de fibres et dans le matériel associé.

Le besoin de câbles à haute densité de fibres optiques étant à présent connu, nous pouvons nous tourner vers les alternatives disponibles sur le marché pour l’interconnexion des Data Centers. L’industrie a estimé que les câbles plats étaient la seule solution possible pour cet espace d’application. En effet, l’installation de câbles tubulaires et d’épissures à une seule fibre prendrait beaucoup trop de temps et un matériel d’épissure trop volumineux ne serait pas optimal pour son utilisation. Par exemple, un câble en fibre 3456 avec un tube lâche prendrait plus de 200 heures pour être raccordé, en supposant une durée de 4 minutes par épissure. En utilisant une configuration de câble plat, le temps de raccordement descend à moins de 40 heures. En plus de ce gain de temps, les boîtiers d’épissures à ruban ont généralement une capacité d’épissures quatre à cinq fois supérieure dans la même empreinte matérielle par rapport à la densité d’épissures à fibre unique.

Une fois cette option déterminée par l’industrie comme étant la meilleure sur le marché, on s’est rapidement aperçu que les câbles plats traditionnels n’étaient pas en mesure d’atteindre la densité de fibres requise dans les conduits existants. L’industrie s’est donc efforcée de doubler la densité de fibres des câbles plats traditionnels.

Deux approches de conception ont émergé. La première approche utilise des rubans matriciels standards avec des sous-unités plus serrées, et l’autre approche utilise des modèles de câbles standard avec un noyau central ou à fentes avec des rubans de conception en filet qui peuvent se plier les uns sur les autres (voir Figure 2).

Figure 2. Différents types de câbles plats pour applications à haute densité.

Après avoir examiné le fonctionnement de ces nouvelles conceptions de câbles plats, explorons les défis que présentent leur terminaison. Étant donné que les câbles portent un indice de protection contre les flammes des installations extérieures (OSP), ils sont tenus de transiter vers un câble homologué pour les installations intérieures (ISP) à moins de 50m de l’entrée du bâtiment, conformément au Code National de l’Electricité (NEC). Pour ce faire, il faut généralement raccorder dans une armoire d’épissure à densité extrême des raccords MTP®/MPO ou LC pré-terminés (câble avec connecteurs préinstallés à une extrémité) ou du matériel pré-terminé avec un pigtail. Dans cette application, les utilisateurs finaux ne se contentent plus d’évaluer la conception du câble OSP, mais utilisent une solution complète pour ces déploiements de liens coûteux et à forte intensité de main-d’oeuvre (Figure 3).

Figure 3. Boîtier d’épissure de transition d’un câble OSP à densité extrême à un câble ISP pré-connectorisé.

Plusieurs options doivent être évalués avant de décider de la meilleure approche. Des études de temps ont montré que le processus le plus long est l’identification et l’éclatement des câbles pour les préparer à être acheminés sur un plateau. L’éclatement désigne le processus qui consiste à retirer la gaine du câble pour protéger les rubans à l’aide de tubes ou de mailles lorsqu’ils sont acheminés vers un boitier d’épissure. Plus le nombre de fibres du câble augmente plus cette étape prend de temps.

Souvent, des centaines de mètres de mailles ou de tubes sont nécessaires pour installer et raccorder une seule liaison en fibre 3456. Ce même processus, long et fastidieux, doit également être effectué pour les câbles ISP, qu’il s’agisse de câbles terminés en pigtail ou sous forme préconnectorisée. Les câbles disponibles aujourd’hui sur le marché varient considérablement en temps d’éclatement. Certains incorporent des sous-unités de fibres routables sur les câbles OSP et ISP (Figure 4) qui ne nécessitent aucun éclatement pour amener les fibres au boitier d’épissure, tandis que d’autres nécessitent plusieurs kits d’éclatement pour protéger et acheminer les rubans (Figure 5). Les câbles avec sous-unités routables sont généralement installés dans des armoires de raccordement spécialement conçues à cet effet et optimisées avec des boitiers d’épissure pour correspondre au nombre de fibres de la sous-unité routable.

Figure 4. Câble avec sous-ensembles routables pour faciliter le processus d’éclatement.

L’identification du ruban et une commande correcte permettent d’assurer un épissurage correct. Les rubans doivent être clairement étiquetés pour être triés une fois la gaine du câble retirée, car un câble de 3456 fibres contient 288 rubans de 12 fibres. Les rubans matriciels standards peuvent être imprimés au jet d’encre avec des instructions d’impression d’identification, tandis que de nombreux modèles utilisent des tirets de diverses longueurs et des numéros pour aider à identifier les rubans. Cette étape est critique en raison de l’importance des fibres qui doivent être identifiées et acheminées. Ce marquage de ruban devient également important en termes de réparation du réseau, lorsque les câbles sont endommagés ou coupés après l’installation initiale.

Figure 5 : Exemple de kit d’éclatement pour câble à haute densité.

Les tendances à venir

Les câbles de 3 456 fibres ne semblent être qu’un point de départ, car il a déjà été question de câbles de plus de 5 000 fibres. La taille des conduits ne s’agrandissant pas, l’autre tendance émergente est d’utiliser des fibres dont la taille du revêtement a été réduite de 250 microns à 200 microns (norme de l’industrie). Les dimensions de la gaine et du coeur de la fibre restent inchangées et n’affectent ainsi pas les performances optiques. Cette réduction de la taille du revêtement des fibres peut permettre d’ajouter des centaines ou des milliers de fibres supplémentaires dans des conduits ayant la même taille qu’initialement.

L’autre tendance sera la demande croissante des clients pour des solutions tout compris. Assembler des milliers de fibres dans un câble a résolu le problème de la densité des conduites et a créé de nouveaux défis en termes de risque et de vitesse de déploiement du réseau. Les solutions novatrices qui aident à éliminer ces risques et à réduire la vitesse de déploiement continueront de mûrir et d’évoluer.

La demande de câbles à haute densité semble quant à elle s’accélérer. Le machine learning, la 5G et les grands campus de Data Centers sont autant de tendances qui stimulent la demande pour ces liaisons DCI. Ces déploiements continueront de mettre l’industrie au défi de développer des solutions tout compris pouvant s’adapter efficacement pour une utilisation maximale des conduites sans devenir de plus en plus difficiles à déployer.

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Par David Hessong, Manager Global du Développement des Marchés Data Center, Corning Inc.