Même s’ils connaissent une croissance rapide, les services cloud représentent encore une part relativement modeste de l’informatique des entreprises
Le cloud est une tendance majeure que connaît l’informatique et que doivent mettre en œuvre les DSI aujourd’hui. Elle présente plusieurs composantes : technologiques bien sûr, mais aussi organisationnelle avec un impact important sur les ressources humaines. « Même s’il connaît une croissance rapide, le cloud ne représente encore qu’une part modeste de l’informatique » rappelle Grogor Petri, directeur de recherche au Gartner. Une enquête récente réalisée par le cabinet auprès de DSI dans 9 pays montre que 80 % des entreprises déclarent qu’ils utiliseront des services cloud dans les 12 ans à venir contre seulement 38 % aujourd’hui. Bien sûr, utiliser des services cloud recouvre une signification très variable pouvant aller de l’utilisation d’une application basique et non structurante comme la messagerie d’entreprise à la mise en œuvre d’un ERP constituant la véritable colonne vertébrale du SI.
Selon la dernière étude publiée par Verizon Terremark intitulée 2013 State of the enterprise cloud report, l’utilisation du stockage en mode cloud a augmenté de 90 % de janvier 2012 à juin 2013 et le nombre de machines virtuelles de 35 %. Les entreprises font du cloud une utilisation qui va au-delà du développement et du test d’applications, les applications de production représenteraient désormais 60 % du cloud.
Mais si la tendance est bien là, la transformation se fera de manière relativement lente car les taux de croissance actuel s’applique à une réalité encore modeste. Quelques hypothèses simples permettront de s’en convaincre. Si le cloud représente 10 % de l’informatique globale et qu’il évolue au rythme de 5 % contre 2 % pour l’informatique classique, il ne représentera que 12,5 % huit ans plus tard. Et si l’on retient des hypothèses de croissance respective de 10 % et 3 %, il ne représenterait que 17 % huit ans plus tard. Ce qui n’empêche que le « cloud computing aura une influence considérable » sur les DSI, les entreprises et l’économie en général. Lors de l’enquête du Gartner, quelque 60 % des DSI déclarent qu’ils augmenteront leurs investissements dans le cloud sur les deux ans à cinq à venir contre 6 % qui les réduiront.
Selon le Gartner, trois facteurs ont un impact important sur le développement du cloud à moyen terme. Le premier est lié à l’utilisation du cloud à des fins tactiques pour résoudre des problèmes spécifiques. La consolidation de plusieurs systèmes de messagerie d’entreprise par exemple. Dans la logique de mise en œuvre que synthétise le Gartner dans son hype cycle, le cloud est encore le fait des utilisateurs pionniers et innovateurs. Et le passage vers un marché de masse ne se fait pas de manière linéaire rappelle le Gartner.
Un deuxième facteur concernera la montée progressive du cloud dans la chaine de valeur, des services d’infrastructures, qui ne sont pas au cœur des entreprises, à des services métier. Alors que la transformation progressive impliquant des services de rehosting, de codage ou de recompilation existante d’application pour les faire fonctionner à l’identique en mode IaaS ou PaaS peut avoir un impact limité sur le fonctionnement de l’entreprise, le remplacement d’applications existantes par des services en mode cloud entraînera des modifications beaucoup plus importantes avec des changements au niveau des process et dans la manière de travailler. C’est là un grand classique lorsqu’une nouvelle technologie fait son apparition. Les premières utilisations d’Internet nous l’on montrer. La mise en place des premiers sites Web des entreprises était de la simple publication d’informations grâce à un nouveau canal. Puis sont arrivés des services réellement nouveaux tirant parti des nouvelles technologies et qu’il n’était pas possible de mettre en œuvre avec des moyens traditionnels.
Le troisième facteur est que l’introduction des services cloud va conduire à une utilisation beaucoup plus diversifiée de solutions avec des implémentations et des calendriers différents. Les applications isolées peuvent être hébergées pour fonctionner en mode IaaS, être réécrites pour fonctionner en mode PaaS ou tout simplement remplacées par des applications SaaS. Evidemment, les délais de mise en œuvre de ces trois solutions seront très différents pouvant aller de quelques mois à plusieurs années. Dans certaines, la transformation d’applications hautement stratégiques et complexes pourra être décidé en premier, précisément pour tirer parti des possibilités des nouvelles technologies.
D’autant que le cloud rebat les cartes et permet aux entreprises de petite taille d’avoir accès aux mêmes ressources que les grandes. Dans une économie où les services jouent un rôle de plus en plus important, la concurrence va donc être réactivée avec un accès à l’information plus simple et moins onéreux. Les applications liées au big data pourront bénéficier aux PME comme aux grandes entreprises : on se souvient de la formule selon laquelle sur Internet personne ne sait que vous êtes un chien. Avec le cloud, une entreprise de trois personnes peut avoir accès aux mêmes ressources qu’une multinationale.
Bien sûr, le développement des services cloud suppose un réseau offrant toutes les qualités nécessaires, notamment en matière de fiabilité, de sécurité et de débit. Sur ce dernier point, la Commission européenne vient de tirer le signal d’alarme : « l’Europe prend du retard dans la course mondiale à l’établissement de connexions à large bande fixes et rapides. Concrètement, les sociétés de télécommunications sont peu performantes, les autres entreprises perdent en compétitivité et les consommateurs, frustrés, ont un train de retard dans le domaine de l’internet ». En cause notamment, les orientations actuellement fournies aux autorités de réglementation ne donnent tout simplement pas aux entreprises la certitude nécessaire à la réalisation d’investissements. C’est donc la un défi à relever pour le vieux Continent pour la mise en œuvre d’infrastructure réseau de qualité. Suivant les technologies et les délais fixés, entre 100 milliards et 270 milliards d’euros sont nécessaires pour étendre l’Internet à haut débit à toute l’Europe.