D’un côté Huawei est évincé en 2021 du Top 5 des fabricants de smartphones suite aux restrictions américaines. De l’autre, Xiaomi réussit à s’imposer en n°2 mondial en un temps record. Décidément, le marché des smartphones n’est pas comme les autres…

La célérité avec laquelle un leader chinois peut en remplacer un autre est étonnante. En un temps record, la marque Xiaomi s’est hissée à la seconde place mondiale des fabricants de smartphones dans le monde et sur la première place en France. Elle profite de la dégringolade toute aussi rapide de Huawei, l’ancien leader Chinois étant depuis deux ans paralysé par les mesures américaines de bannissement qui lui interdit notamment l’accès à Android et au fabricant de processeurs TSMC.

Huawei en perte de vitesse mais résiliente

Privé de sources d’approvisionnement sur les composants, Huawei ne peut plus sortir de produits comme il l’entend et se trouve freiner de toutes parts dans ses innovations. Certes, l’entreprise Chinoise investit pour promouvoir son propre système d’exploitation pour mobiles (HarmonyOS) et disposer d’usines de fabrication de processeurs chinoises mais tout cela prend du temps et coûte beaucoup d’argent.

L’entreprise souffre mais reste un géant par la diversité de ses activités et son emprise sur le marché asiatique. La semaine dernière, elle a annoncé un chiffre d’affaires pour le premier semestre 2021 de 49,56 milliards de dollars en chute libre par rapport à l’an dernier (70 milliards de dollars). Mais ses bénéfices sont en revanche en croissance de 0,6% (pour frôler les 4,8 milliards de dollars) ce qui démontre quand même une étonnante capacité de gestion de la crise et de résilience.

Toutefois, Eric Xu, le CEO de Huawei, a expliqué que les objectifs de la marque sur les 5 prochaines années étaient « de survivre, et le faire de manière écoresponsable (durable) ».

Xiaomi, l’irrésistible et fulgurante ascension…

Ce qui est surprenant dans cette descente de Huawei, c’est qu’elle ne profite pas vraiment aux deux leaders historiques du marché de la mobilité – Apple et Samsung – mais à un autre acteur Chinois : Xiaomi. Deux autres acteurs Chinois bénéficient aussi de la déchéance de Huawei : Vivo et Oppo qui viennent aujourd’hui truster le Top 5 mondial.

Xiaomi produit des modèles haut de gamme pour démontrer son savoir faire technologique mais porte l’essentiel de ses efforts sur le marché des modèles à moins de 400 euros qui représentent 60% du volume en France. La stratégie est de proposer un maximum de modèles sur ce secteur à des rapports qualité/prix agressif pour acquérir une base client avec la volonté ensuite de la fidéliser (notamment autour d’autres produits comme les montres connectés, pèses personnes, coachs sportifs, TV, etc.) et de s’inscrire sur les smartphones dans un business de renouvellement. Reste à savoir si, dans l’univers Android, il existe un attachement aux marques comme cela est le cas avec Apple. Avec des acteurs comme Vivo et Oppo qui grignotent des parts de marché, difficile de faire des prédictions.

L’actuelle stratégie de Xiaomi est payante mais n’est pas sans rappeler celle de Huawei avant les mesures américaines. Une stratégie qui produit les mêmes effets : en 5 ans, la marque s’est hissée dans le Top 3 des fabricants de mobiles. Reste espérer qu’elle ne conduira pas aux mêmes conséquences en matière de sanctions et de mesures protectionnistes chez les américains. Le changement de gouvernement US n’a pas changé grand-chose aux politiques de bannissement et aux relations commerciales entre USA et Chine.

Reste que, selon Canalys, Xiaomi aurait écoulé au second trimestre 2021 avec près de 53 millions d’unités (80% de croissance), ce qui en fait le second constructeur mondial (17% de parts de marché) à une encablure du leader Samsung (58 millions d’unités écoulées soit 18% de parts de marché). La marque passe ainsi significativement devant Apple (46 millions d’unités écoulées, 14% de parts de marché) alors que la firme dirigée par Tim Cook annonce pourtant des trimestres records depuis la sortie de l’iPhone 12. Si la croissance de Xiaomi se poursuit ainsi, la marque – qui est déjà première en France – pourrait prendre la tête du Top 5 à l’international d’ici la fin de l’année. Il lui faudra pour cela résister au push d’Apple avec le lancement des nouveaux modèles au troisième trimestre mais aussi à la crise de la supply chain.

Car, le marché des smartphones boosté par la crise pandémique est, comme le marché PC, lui aussi confronté à la grave pénurie du marché des semi-conducteurs. « Dans certaines régions, l’inventaire des canaux de distribution des smartphones est dangereusement bas, » explique Ben Stanton, directeur de recherche chez Canalys. « Les grandes marques pratiquent déjà une priorisation régionale et de canal pour tirer le meilleur parti de leurs approvisionnements limités. En conséquence, d’énormes conflits internes sont apparus, alors que les responsables régionaux tentent d’obtenir une allocation. En outre, de nombreux fournisseurs ont désormais également supprimé les incitations à la vente pour qu’une région dépasse ses objectifs, afin d’éviter que les approvisionnements ne soient trop sollicités. À l’avenir cependant, alors que les contraintes d’approvisionnement s’atténuent en 2022, le marché devrait de nouveau exploser. Une guerre a déjà commencé, les marques injectant des sommes substantielles dans le marketing de pièces maîtresses sur les marchés internationaux. Vivo et Oppo ont été à l’avant-garde de cette dynamique, en achetant des parrainages lucratifs avec la Premier League indienne, la Coupe du monde, Wimbledon et le FC Barcelone ».