Depuis le rachat – en 2019 et pour un peu moins de 100 millions d’euros de 75% du capital – de l’opérateur et hébergeur Jaguar Network, Free avait permis à Iliad d’afficher clairement des vues sur le marché B2B. Après le lancement en mars 2021 de sa première « box pour les pros », Free a décidé de muscler son offre de cloud hybride en direction des entreprises.

Free a-t-il réellement les moyens techniques de ses ambitions ? Avec sa filiale Jaguar Network, l’autre filiale B2B de Xavier Niel, propose une offre présentée comme pouvant avec son Cloud XPR assurer aussi bien la migration des applications critiques vers le Cloud que garantir de disposer d’une offre « souveraine de cloud hybride pour répondre aux exigences des environnements des entreprises ». Et pas moins ! Toutefois, la filiale de l’opérateur trublion a-t-elle les moyens de répondre aux besoins les plus exigeants de nos entreprises ?

Démocratiser la migration des applications critiques vers le cloud

L'offre de cloud hybride Cloud XPR comparée aux concurents.L’ambition est pourtant clairement affichée. D’autant que le marché est là, comme le rappelle Denis Planat, le directeur général de Jaguar Network nommé en mai 2021. 80 % des entreprises en France n’auraient en effet pas encore franchi le pas!

Et pour séduire ceux qui seraient encore dubitatifs quant à leur capacité de migrer, Free veut offrir avec Cloud XPR une nouvelle «expérience du cloud conçue pour répondre concrètement aux besoins des DSI».

Toutefois suffit-il d’afficher disposer d’un « cloud hybride, managé et sécurisé au juste prix » pour que les DSI réticentes — ne serait-ce en raison de la complexité induite que des risques de cybersécurité — sautent le pas ?

Des ambitions de très haute disponibilité mais limitées à la France

Cloud XPR de Jaguar Network avec ses 20 modules de Cloud Hybride façon Free. Si sur le papier la nouvelle solution Cloud XPR orchestre plus de vingt modules standardisés (VMs, serveurs dédiés, stockage, firewall, VPN, Private network…) et donne l’accès à une marketplace de plus de cent cinquante applications tierces, la promesse de « très haute disponibilité grâce à la géo-redondance » tient-elle pour autant la route ?

Personne ne doute des infrastructures de Jaguar Network (qui soit dit en passant reposent sur VMware, Veeam, Commvault, Scality, Bitnami…). Mais, comme l’a démontré l’incendie des infrastructures d’OVHcloud, encore faut-il que les entreprises clientes mettent en œuvre les bonnes pratiques et les services PCA/PRA mis à leur disposition. Même si la géoredondance est apparemment systématiquement appliquée et le PCA/PRA « intégré », il existe encore un flou sur le transfert automatique des VM et sur ce qui est optionnel ou non dans l’offre Cloud XPR.
Difficile pour l’instant de se faire une idée concrète puisque l’accès à Cloud XPR démarre par une demande de devis. Une démarche qui démontre que l’offre Cloud XPR semble plus alignée sur des besoins de « cloud privé » (estampillé d’un marketing « Cloud Hybride), peut être pour ne pas trop marcher sur les platebandes de Scaleway, l’autre fournisseur Cloud d’Iliad (la maison mère de Free) ?

Denis Planat, Directeur Général chez Jaguar Network, affirme que « cent experts Cloud et sécurité » sont là pour apporter des services a valeur ajoutée avec une supervision active qualifiée par l’ANSSI et que l’offre repose sur « des infrastructures éprouvées partout en France au travers de douze datacenters certifiés ISO 27001 et HDS et qui consomment de l’électricité issue à 100 % d’énergies renouvelables ».

Autrement dit, Denis Planat joue un peu avec les mots : « une supervision active qualifiée par l’ANSSI » n’a rien à voir avec la qualification SecNumCloud et « 100% d’énergies renouvelables » dans un pays où l’énergie est avant tout nucléaire porte à débat.

Néanmoins Cloud XPR compte se démarquer par une interface simple, un pilotage « hyper-simplifié« , tout en surfant sur la vague « souveraineté numérique » portée par le gouvernement et servie sur un plateau par les tensions géopolitiques.

Réponse dans quelques mois par des entreprises utilisatrices

À toutes ces questions, il n’appartient finalement qu’aux entreprises utilisatrices de le démontrer. Et tant que différents cas clients ne pourront l’attester, on ne pourra que se demander si la problématique d’un Cloud se résume réellement à la seule promesse d’une simplicité possible grâce à une console d’administration qui a le mérite de la clarté et de tarifs qui renverraient toute offre concurrente à la poubelle.

Pour l’heure — une fois encore — Free espère avoir tout compris.

 


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