Il y a moins de dix ans, les grandes entreprises cotées en bourse étaient le graal des jeunes diplômés ambitieux. Depuis, l’attractivité de l’emploi a sensiblement muté : ce sont désormais les startups et leur esprit bouillonnant qui font rêver les candidats sur le marché du travail. Futurs piliers économiques, ces jeunes entreprises sont néanmoins vouées à perdre leur effervescence et leur attrait au fil de leur croissance. Pourtant, certaines compagnies emblématiques comme Facebook semblent avoir réussi le pari de conserver le dynamisme et l’effusion d’idées propres aux startups, tout en devenant des géants incontournables du marché. Alors la vieillesse, c’est dans la tête ?

Astuce #1 : Se remettre en question

Neuf start-ups sur dix ne résistent pas face à une mauvaise gestion : leur culture du savoir-faire technique et d’une dynamique de création se heurte ainsi souvent à une conscience de gestion qui fait défaut. Steve Jobs a apporté l’idée d’Apple, John Sculley, les armes nécessaires à son développement : dans le monde des start-ups, il faut savoir s’entourer pour mieux se développer. Connaître son domaine d’expertise et savoir quelles compétences aller puiser à l’extérieur incarnent les fondements de l’entrepreneuriat : faire appel à des consultants, recruter des profils complémentaires – s’adapter.

Une nécessité qui est tout aussi incontournable pour les grandes entreprises. Si les process de gestion sont déjà rodés dans des entreprises en vitesse de croisière, au fil de leur croissance, une remise en question de la société, de ses acquis et des services qu’elle offre au public et à son équipe est incontournable pour assurer sa pérennité.

Astuce #2 : Appliquer une politique RH très vivace

Garder une équipe mouvante au fil de la croissance apporte un souffle nouveau à l’entreprise, aussi bien en termes d’idées que d’actions : il s’agit de capitaliser sur la cohésion et la volonté de réussite indestructible des équipes propres aux start-ups. On évoque souvent la « règle des 10% » : 10% du personnel à promouvoir et 10% du personnel à remplacer chaque année pour conserver un « esprit start-up », une notion synonyme d’atmosphère foisonnante de travail mais à l’écoute de ses employés, inclusive, qui sait allier travail, bien-être et solidarité. Un environnement très propice au développement, qui s’épanouit souvent dans les petits groupes soudés et cohésifs typiques des start-ups. La croissance de l’entreprise a tendance à dissoudre cet esprit de proximité qui allie les employés au-delà des règles hiérarchiques.

Pour garder l’esprit start-up, il faut savoir garder cette émulation de groupe, se remettre en question pour ne pas se reposer sur ses acquis : chercher à atteindre l’excellence à tout moment, en appréciant le progrès sans jamais s’en satisfaire. Si l’on a tendance à définir l’esprit start-up par la taille ou l’âge de l’entreprise, on se trompe pourtant. L’âge ne se traduit pas que par des chiffres, et le même principe s’accorde aux entreprises. L’esprit start-up existe encore dans des sociétés comme Google et Blablacar, symboles de cette atmosphère malgré leur expérience et leur chiffre d’affaires.

Astuce #3 : Faire évoluer sa vision des marchés

Rechercher la réussite : pour durer, il faut s’inscrire dans cette vision d’excellence, que ce soit en interne, en veillant au confort des employés, ou vis-à-vis des clients, en continuant à devancer leurs besoins. Si l’excellence n’est pas au rendez-vous, on ne parle plus de start-up, mais de déconvenue. Pour cela, il est incontournable de savoir faire évoluer sa vision du marché, de savoir mettre en place une veille, d’observer la concurrence. Adopter une vitesse de croisière ne serait-il pas, finalement, l’ultime signe qu’une entreprise ne fonctionne plus comme une start-up ? C’est-à-dire avec une force de travail bouillonnante et l’exigence d’un retour sur investissement quasi immédiat conjugué à une stratégie de développement à long-terme.

En insufflant une dynamique propre aux start-ups à un groupe en passe d’être obsolète, La Redoute a su rénover ses process internes, renouveler son image et relancer la marque sur un marché pourtant saturé.

Si les entreprises leaders veulent préserver leur place, elles doivent maintenir leur attractivité. Le bien-être des employés, l’innovation, la culture du travail collaboratif sont autant d’éléments loin d’être incompatibles avec la croissance des grandes entreprises. Beaucoup de composantes, mais aucune recette magique, si ce n’est une remise en question perpétuelle, plus efficace que le plus onéreux des antirides.

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Michel Cohen est Directeur France & Afrique, Exclusive Networks