Covage est un opérateur d’infrastructures de fibre optique neutre et indépendant qui maîtrise de bout en bout la chaîne de valeur, du déploiement du réseau jusqu’à la fourniture du service télécom aux fournisseurs d’accès. Jean-Michel Soulier, président de Covage fait part de ses commentaires à la suite de la publication du rapport Champsaur (voir ci-dessous une interview de Paul Champsaur par l’Arcep) intitulé « Accompagner la transition du réseau téléphonique de cuivre vers les réseaux à très haut débit en fibre optique » et milite pour une accélération du passage la fibre.

InformatiqueNews : Le plan THD, qui prévoit de donner accès au très haut débit en 2022 à l’ensemble des Français, vous parait-il réaliste tant du point de vue technique que sur le plan de son financement ?

Jean-Michel Soulier : Oui, techniquement, c’est faisable même si le lancement depuis 2012 est relativement lent. En fait, les dix ans de ce plan sont justifiés par la nécessité d’échelonner les investissements. L’enveloppe des 20 mds€ qui a été avancée est réaliste. Pour ce qui concerne la partie des opérateurs privés (les zones denses), c’est à eux qu’il faut poser la question. Le rachat de SFR par Numericable rebat un peu les cartes. Ce nouvel acteur jouera le rôle d’aiguillon dans les zones câblées par Numericable car ce type de réseau permet de faire THD. Dans les zones moyennement denses (environ 40 % du territoire), ce sont l’Etat et les collectivités territoriales qui sont aux manettes. Le plan pour la partie publique est bien organisé et suffisamment doté sur le plan financier.

InformatiqueNews : Le rapport Champsaur publié en février dernier a fait un état des lieux et répondu par la négative à la question de la fin du réseau cuivre préférant une « mort naturelle » plutôt qu’une fermeture active. Partagez-vous cet avis ?

J.M.-S : Le rapport est plus un constat qu’un ensemble de préconisations. Il considère la fibre comme une amélioration quantitative grâce à un débit plus élevée plutôt que qualitative qui va faire naître de nouveaux opérateurs et apporter de nouveaux services. C’est une nouvelle technologie comme la 4G l’est par rapport au GSM ou comme le smartphone par rapport au téléphone. Nous aurions souhaité qu’il définisse un cadre plus clair et plus volontariste dans le basculement du cuivre vers la fibre de manière à susciter plus activement des investissements privés. Par exemple, en affirmant que lorsqu’une zone est déclarée fibrée, on se donne 5 ans pour fermer le réseau cuivre. Evidemment, il faudrait changer la loi car, dans la situation actuelle, on ne peut pas forcer l’opérateur historique à fermer son réseau. Comme le calendrier législatif est déjà assez chargé, on préfère donc laisser les choses en l’état. Mais cela a déjà été fait dans d’autres domaines, le réseau hertzien par exemple pour pouvoir passer à la TNT.

Dans les zones déjà câblées, Orange est motivé pour concurrencer activement SFR/Numericable (NDLR : L’accord entre Orange et SFR va devoir être actualisé suite au rachat de dernier par Numericable[1]). Mais dans les zones moyennement denses qui ne sont pas câblées, on laisse l’initiative à un opérateur qui ne veut pas vraiment prendre d’initiative. Tout le monde est d’accord sur la finalité, un peu moins sur les moyens d’y parvenir.

InformatiqueNews : En quoi, la fibre apporte quelque chose aux entreprises ?

J.M.-S : Dans les zones où nous gérons un réseau de fibre, nous réussissons à attirer des dizaines d’opérateurs qui offrent de très nombreux services aux entreprises. Pour certaines d’entre elles, la fibre c’est la possibilité de rester là où elles sont implantées tout en améliorant leur offre de services. La fibre va favoriser l’émergence de data centers mutualisés – c’est le cas pour les mairies qui partagent des réseaux privés – ou l’évolution de l’informatique vers le cloud. Dans le domaine de la santé, l’installation de la fibre permet aux hôpitaux, cliniques, laboratoires d’être sur la même boucle et d’échanger des fichiers d’imagerie numériques. Des études ont montré que la fibre permettaient soit de faire des économies soit d’avoir un meilleur service au même coût.

InformatiqueNews : une question simple : combien coûte le déploiement d’un kilomètre de fibre optique ?

J.M.-S : On ne raisonne pas tant en terme de km que de prises. Et il est important de rappeler qu’il est possible de réutiliser les fourreaux et les poteaux de France Télécom, moyennant une certaine rétribution déterminée par l’ARCEP, ce qui réduit considérablement les dépenses en génie civil. D’une certaine manière, on bénéficie des investissements en infrastructure faits dans le cadre du monopole de France Télécom. Ce qui n’est pas le cas dans tous les pays, certains ayant simplement enfoui leur ligne. Sur un département, on n’a en moyenne que 5 % de coûts liés aux travaux de génie civil lorsque le fourreau est obstrué ou écrasé et qu’il faut alors creuser. Dans ces conditions, le coût moyen par prise est de l’ordre de 800 euros.

InformatiqueNews : Vous intervenez principalement dans les zones moyennement denses dans le cadre d’une délégation de services publiques (DSP) et de réseaux d’initiative publique (RIP). Comment cela fonctionne-t-il ?

J.M.-S : Le département de Seine-et-Marne qui vient de nous attribuer la DSP pour le FTTH est assez représentatif (voir encadré ci-dessous). Il est constitué pour 1/3 de zones denses à proximité de Paris et pour 2/3 de zones rurales. Nous avons gagné contre Orange dans la phase finale, preuve du sérieux de notre offre et grâce à notre approche flexible. Nous y étions présents depuis 2007 dans le cadre d’une première DSP destinée aux entreprises. A ce jour, un millier d’entreprises bénéficient à ce jour du THD et nous avons attiré de nombreux opérateurs (Completel, Adista, Acropolis Télécom, Céleste, Colt Telecom, SFR, Bouygues…). Dans cette deuxième DSP, nous avons convaincu de nombreux opérateurs orientés grands publics qui gagnent de l’argent (Wibox, K.Net, NordNet…). Et de nouveaux opérateurs vont apparaître et des géants du Net viendront, eux-aussi, sur ce marché.

 Les réseaux gérés par Covage
Covage

 

FTTH en Seine-et-Marne : DSP attribuée à Covage
La Seine-et-Marne (environ 1,2 million d’habitants) accélère le développement numérique de son territoire et confie à Covage, opérateur d’infrastructures très haut débit, la gestion d’une nouvelle délégation de service public (DSP) d’une durée de 25 ans. Le montage innovant de ce contrat, mixant affermage et concession est une première en France dans le domaine du FTTH.
Covage a pour objectif de desservir 50% des Seine-et-Marnais en fibre optique d’ici 2019, 75% d’ici 2024, et 99% en 2029, selon les objectifs du SDTAN (Schéma Directeur Territorial d’Aménagement Numérique). Au total, ce sont 270 000 abonnés concernés portant le volume final de prises à près de 320 000.
Ce projet d’envergure d’un montant global de 358 millions d’euros d’investissement, a été initié par le Syndicat mixte Seine-et-Marne Numérique, qui regroupe le département, la Région Ile-de-France et 26 structures intercommunales (EPCI) adhérentes à ce jour. La participation publique (Etat, Région, Département, EPCI) s’élève à 100 millions d’euros, Cpvage investissant pour sa part plus de 200 millions d’euros dans la création de l’infrastructure et les raccordements finals.
Ce chantier va apporter de nombreux bénéfices aux habitants du département, tels que la fin de l’inégalité d’accès aux services Internet sur ADSL, l’accès à Internet à très haut débit, l’accès à des usages simultanés et bien sûr au téléphone, à Internet et à la télévision, etc. L’installation de la fibre optique facilite également l’envoi de données et le téléchargement de documents de façon rapide grâce au Cloud. Les Seine-et-Marnais auront ainsi l’opportunité de profiter pleinement de l’ensemble de ces services, en phase avec l’évolution des modes de vie actuels (télétravail, mobilité, etc.).
La Seine-et-Marne figure parmi les territoires les plus e avance en matière d’aménagement numérique et d’engagement dans le plan France Très Haut Débit. Covage est présent en Seine-et-Marne depuis 2006 au travers de sa filiale Sem@for77, qui assure l’exécution d’une première délégation de service public pour le déploiement d’un réseau fibre optique structurant donnant déjà accès au THD à près de 1000 entreprises et sites publics (hôpitaux, collèges, lycées, mairies, etc.), dans le cadre d’une concession de 20 ans.

 

Covage : faits et chiffres
Covage est un opérateur d’infrastructures THD neutre créé en 2006 :
– 330 M€ d’actifs gérés
– 25 Réseaux d’Initiative Publique
– 9 700 km d’infrastructure fibre optique (3400 km dans un backbone national et 6300 dans des réseaux locaux) ;
– Un CA de 49 M€ et 140 collaborateurs ;
– 15 M€ par an d’investissements.


Interview de Paul CHAMPSAUR, président de L… par ARCEP

_________
[1]
France Télécom-Orange et SFR annoncent un accord pour le déploiement de la fibre optique au-delà des zones très denses (novembre 2011)