Les vertus du travail en équipe ne sont plus à prouver depuis longtemps et les entreprises, sans exception, rivalisent d’imagination pour mettre le partage des idées et des compétences au service de leur compétitivité. Il est donc ironique de constater que ce sont ces mêmes entreprises qui sont parfois le premier frein au travail d’équipe. En cause : les silos.

Les silos regroupent les divisions et hiérarchies gênantes qui enferment les collaborateurs dans des cases, les marginalisant et les isolant, tout en entretenant une culture du « eux et nous » qui demeure l’éternel grief fait à la vie en entreprise. Capables de prendre de multiples formes, ils sont particulièrement tenaces.

Il est évident que le cloisonnement du personnel a des répercussions plus profondes : il compromet le partage des informations et de meilleures pratiques. Par exemple, si le service informatique d’une entreprise a pour objectif cette année de migrer toutes les données sur une nouvelle architecture, pourquoi prendrait-il le temps de faire les segmentations complexes demandées par le service Marketing dont l’objectif est de faire des actions personnalisées ?

La redondance ou l’externalisation de certains processus entraînent un manque d’efficacité des salariés  qui finit par diminuer les performances et les profits ; cela explique pourquoi une équipe parfaitement intégrée est devenue le Graal de l’entreprise moderne.

De la documentation marketing en passant par des sessions d’intégration à la conférence annuelle, toutes les occasions sont bonnes pour mettre en avant l’importance d’une vision unique, l’utopie d’une seule culture où tous travailleraient comme s’ils ne faisaient qu’un, une culture de totale cohésion cimentée par les valeurs tant vantées de l’entreprise.

Il s’agit de la théorie mais, si elle est mise en pratique maladroitement, elle ne donne généralement pas satisfaction. Les valeurs d’une marque n’ont de poids que jusqu’à un certain point, servant de baromètre pour déterminer par qui ou bien par quoi est représentée la « bonne » adéquation culturelle, conditionnant les recrutements, promotions ou rétrogradations et permettant de toucher le personnel de terrain, dont l’adhésion est indispensable à la compétitivité.

Dans la réalité, toutefois, il s’agit d’un discours qui a peu de portée au-delà du siège de l’entreprise. Les heures passées à imaginer un slogan accrocheur dans ce but sont inévitablement une perte de temps et ne trouvent guère d’écho auprès de ceux qui sont en première ligne.  Ces efforts ne font que souligner à la fois la profondeur des divisions existantes et l’idée erronée que le marketing peut masquer les failles.

Un élément important manque à l’appel : c’est ici qu’entre en scène l’Analytique. Aujourd’hui à la veille de ce qui est peut-être son application la plus révolutionnaire, en faisant une percée dans la culture d’entreprise pour en bannir définitivement les silos.

En permettant à une analyse approfondie de tirer plus de valeur des données de l’entreprise, cette technologie au confluent de l’investigation criminelle et de la perspicacité humaine alimente l’explosion des données et s’inscrit au cœur de la prise de décision. De plus, sous l’effet de la prolifération des mobiles et de l’omniprésence du Cloud, elle devient d’autant plus intéressante que les leaders du secteur étendent la portée de cette discipline, traditionnellement complexe en entreprise, au-delà du domaine habituel des data scientists et autres spécialistes.

La visualisation joue un rôle central dans cette démocratisation : la présentation des statistiques sous forme de graphique clair offre une vision instantanée des enseignements généralement enfouis au tréfonds des données. Les « non-spécialistes » sont maintenant capables de repérer des anomalies dans les performances et obtenir des indications en temps réel. Il en résulte des pouvoirs et une indépendance qui vont incontestablement remettre en question les hiérarchies et les méthodes de travail traditionnelles. Cela entraînera ainsi la fin de l’étranglement des services informatiques et la dépendance des uns vis-à-vis des quelques privilégiés chargées d’extrapolation des informations.

Les avantages en termes d’efficacité sont manifestes mais les répercussions sont plus profondes : la démocratisation des données met tout le monde sur un pied d’égalité. Savoir, c’est pouvoir, et ce n’est qu’en octroyant ce privilège en dehors des limites habituelles qu’il sera possible d’instaurer la transparence et l’égalité nécessaires à la chute des silos endémiques.

Une liberté accrue d’accès et de partage des informations ne peut qu’annoncer une transition de la passivité vers la proactivité et forger une culture où chacun est capable d’obtenir des résultats par lui-même plutôt que d’attendre des instructions, tout en orientant le débat davantage autour de ce que chacun  sait et dans quoi il s’attend à faire partie.

Cette évolution n’interviendra pas du jour au lendemain mais la dynamique est déjà lancée et se traduit là où cela compte le plus – sur le terrain – à travers le nombre croissant d’équipes commerciales ayant accès elles-mêmes aux données pour faciliter le service client sans avoir à s’en remettre aux directives du siège.

La  technologie permettant à chacun de garder son individualité est bien plus susceptible d’aplanir les divisions et donc de favoriser un environnement plus fluide et intégré.

Le vieil adage doit donc être repensé : dans l’entreprise moderne, l’important sera davantage ce que vous connaissez et bien moins qui vous connaissez.

 

 

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Maurizio Canton est CTO de Tibco Software Europe