Le Spatial Computing mixe monde virtuel et monde physique en totale harmonie au point de leur permettre d’interagir entre eux. Ses applications sont aujourd’hui surtout dédiées à l’entreprise. Mais pour combien de temps encore ?

Initiée par Microsoft avec ses Hololens, la réalité mixte adossée aux hologrammes permet de projeter des personnes et des objets, tous virtuels, dans l’espace qui vous entoure et d’interagir avec eux grâce à vos mains, votre vision et votre voix. Elle introduit le concept de « Spatial Computing » où monde physique et monde virtuel interagissent de multiples façons.

Dès que vous portez les lunettes ou le casque adéquats, l’univers physique s’enrichit d’objets virtuels qui peuvent ou non être toujours à la même place. Un chirurgien devant la table d’opération voit apparaître des comptes rendus, des scans et des modélisations 3D qui se superposent à l’environnement de la salle d’opération exactement là où ça l’arrange le plus. Un infographiste 3D devant son PC et son logiciel de modélisation voit apparaître ses créations sous forme d’hologramme à côté de lui, peut interagir avec ses doigts en les faisant tourner par exemple, tout en discutant avec un collaborateur situé à l’autre bout de la planète et pourtant virtuellement présent à ses côtés. Un chauffeur de camion voit se superposer dans son champ de vision des informations contextuelles sur son trajet, entre en communication visuelle avec ses clients et bénéficie d’un tableau de bord virtuel enrichissant celui de son véhicule.

Des applications d’entreprise

Cette capacité à mixer un monde physique et un monde virtuel tout en pouvant interagir avec les deux de façon très similaire est devenue une réalité avec les Hololens 2.0 de Microsoft. Désormais disponibles aussi bien auprès des développeurs que des OEM et des entreprises, les lunettes holographiques de Microsoft ont déjà trouvé de nombreuses applications concrètes : médecine (Philips Azurion), architecture, construction (Bentley Synchro), créations de spectacles, formations et aides à la maintenance, etc. L’éditeur a même commencé à les intégrer au cœur de ses solutions métiers avec Dynamics 365 Remote Assist (assistance visuelle déportée), Dynamics 365 Guides (formations interactives),  Dynamics 365 Layout (co-création 3D)…

Microsoft n’est pas seule sur ce marché. Son principal concurrent se nomme Magic Leap. Certes, la startup semble connaître une période trouble selon Business Insider qui a récemment annoncé le départ de certains cadres et des difficultés à boucler une nouvelle levée de fonds en Série E.
Comme Microsoft, Magic Leap semble de plus en plus se focaliser sur le marché de l’entreprise après avoir démontré beaucoup d’applications grand-public de ses lunettes holographiques. Le fabricant vient en effet de lancer plusieurs applications à destination des professionnels, dont une application permettant de tenir des meetings virtuels (très similaires dans l’esprit à celle de Microsoft). Il essaye aussi de nouer de nombreux partenariats avec des ESN pour développer des scénarios métiers.
La priorité est aujourd’hui clairement sur l’univers de l’entreprise et Magic Leap compte sur son prix plus accessible (2 995$) pour prendre des parts de marché à Microsoft (dont les Hololens 2.0 démarrent à 3 500$).

D’un marché de niche au grand public…

Toutefois, ce marché reste pour l’instant un marché de niche. L’ensemble de tous les marchés de la réalité augmentée, de la réalité virtuelle et de la réalité mixte confondus, ne devrait peser que 18,8 milliards de dollars en 2020 selon IDC, la réalité mixte holographique ne représentant qu’une infime partie de cet ensemble. Si l’on en croit TheInformation, Magic Leap n’aurait écoulé qu’une petite partie des 100 000 lunettes ‘Magic Leap One’ qu’elle espérait vendre en un an.

La vulgarisation de ce marché se fera-t-elle avec l’arrivée d’Apple ? C’est un secret de polichinelle mais l’entreprise travaille depuis des années sur des lunettes de réalité mixte. Plusieurs brevets en témoignent. Le dernier en date porte sur « l’affichage d’objets virtuels au plus proche de l’oeil » prouvant que la marque travaille sur des concepts qui vont au-delà de la simple réalité augmentée et s’étendent au « spatial computing ». Apple a également acquis plusieurs startups du domaine de l’AR/VR telles que VRvana ou Akoni Holographics. Sa volonté semble toutefois de vouloir toucher un public bien plus vaste que celui des actuelles lunettes de Microsoft ou de Magic Leap. Certains brevets laissent en effet transparaître des scénarios grand-public comme l’utilisation de telles lunettes au volant de sa voiture, dans la rue, dans la maison… Selon les rumeurs, Apple pourrait introduire ses premiers modèles entre 2021 et 2023.

Mais la marque à la pomme pourrait se faire doubler par des concurrents plus réactifs. Il y a quelques jours, lors de son événement Inno Day 2019, le chinois Oppo a présenté ses « Oppo AR Glass », des lunettes de réalité mixte bardées de capteurs pour permettre des interactions entre le monde physique et le monde virtuel. Si aucune date de disponibilité n’a encore été avancée, Oppo semble bien ici viser le grand public. Dans un autre esprit, plus proche de la Réalité Augmentée que du Spatial Computing, Forth a annoncé cesser la commercialisation de ses lunettes « Focals 1.0 » pour se concentrer sur ses « Focals 2.0 », des lunettes de réalité augmentée d’apparence très classique mais dotées de fonctions d’affichage d’informations élaborées dont la sortie est attendue en 2020.

Bref, l’année prochaine devrait être riche en annonces (aussi bien applicatives que matérielles) et permettre à cette informatique « environnante » de trouver de nouveaux usages et de se concrétiser un peu plus. Le CES en janvier pourrait ainsi nous réserver quelques bonnes surprises dans ce domaine…

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