Alors qu’IBM poursuit sa boulimie de rachats en acquérant il y a quelques jours la société spécialisée dans la sécurité Trusteer pour 1mds$, Cisco annonçait la suppression de 4000 postes et voyait son titre chuter.

Si elle s’est largement réinventé ces depuis une vingtaine d’années se transformant peu à peu en éditeur de logiciels et en société de services et en investissement lourdement sur les marchés émergents – IBM n’est-elle pas devenue une société indienne battant pavillon américain ? – IBM ne semble plus en mesure de générer de la croissance et est désormais un adepte du « faire plus avec moins », à savoir dégager de plus en plus de bénéfices pour un chiffre d’affaires stagnant. Depuis une dizaine d’années, son chiffre d’affaires connaît une croissance faible ( 1,6 % par an en moyenne), un taux inférieur à celui du marché, et ce malgré un activisme exacerbé en matière de rachats qui donne l’impression d’un tonneau des danaïdes ou d’un trou noir interstellaire absorbant toute la matière autour de lui.

Il y a quelques jours, IBM déboursait 1 milliard de dollars pour acquérir l’éditeur de logiciels israélien Trusteer réalisant ainsi la deuxième acquisition la plus importante dans la sécurité après celle d’ISS en 2006 qui avait déjà coûté la bagatelle de 1,3 milliards de dollars. Ce rachat faisait suite à celui en juin plus tôt de SoftLayer Technologies, une société spécialisée dans le cloud, pour un montant de 2 milliards de dollars. Cela porte à 35 sociétés le nombre de sociétés rachetées depuis 2010 et plus de 120 depuis 2001 (List of mergers and acquisitions by IBM). La plus importante étant celle de Cognos en janvier 2008 pour laquelle Big Blue s’était allégé de 5 milliards de dollars. Et ne compte pas s’arrêter. De 2013 à 2015, elle a planifié de dépenser 20 milliards supplémentaires pour absorber encore d’autres sociétés.

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Mais l’activité de rachats n’est pas la plus importante en termes financiers. Celle qui a sollicité le plus le portefeuille d’IBM est le rachat d’actions, une activité pour laquelle elle a consacré 123 milliards de dollars depuis l’an 2000 (Generating Higher Value at IBM), soit plus de la moitié des liquidités disponibles. Certes IBM continue à investir en R&D avec des programmes de recherche avancés dans l’informatique quantique, les puces intelligentes (IBM veut rapprocher l’informatique du cerveau humain), les mémoires atomiques , mais l’objectif premier pour lequel elle consacre toute son énergie est d’atteindre au moins le niveau de 20 dollars par action en 2015. A cette date, environ 50 % des bénéfices avant impôts seront issus de l’activité développement de logiciels.

C’est l’ancien CEO Sam Palmisano, qui avait engagé cette stratégie en se débarrassant des activités jugées peu rentables, principalement liées au développement de matériel. IBM a commencé par céder sa division PC au Chinois Lenevo, en passe de devenir le premier constructeur de PC au monde devant HP. Aujourd’hui, IBM s’est largement recentré sur les serveurs haut de gamme et les supercalculateurs. Il a récemment créé une alliance autour des microprocesseurs Power (Alliance autour des data centers), une initiative pour lutter contre la très rude concurrence des x86 d’Intel qui ont désormais un quasi-monopole sur les serveurs. Toutes les puces hors x86 ont peu à peu perdu du terrain que ce soit celles de Digital, d’HP, de Sun.

Côté acquisitions, IBM continue une stratégie qui n’est pas nouvelle mais qui s’est singulièrement accélérée depuis une dizaine d’années.

Licenciements boursiers chez Cisco

De son côté, Cisco joue sur le registre bien connu ces derniers temps des réductions de coûts en annonçant il y a quelques jours la suppression de 4000 postes, environ 7 % des effectifs de l’entreprise. Ce que l’on appelle dans certains cercles les licenciements boursiers. « L’environnement pour nos métiers s’est légèrement amélioré mais pas du tout au rythme que nous aurions souhaité », avait indiqué John Chambers, le CEO de l’entreprise lors d’une conférence téléphonique qui avait suivi l’annonce des résultats.

A la suite de cette annonce, le titre a perdu jusqu’à 9 % de sa valeur. Cette décision concerne principalement l’encadrement intermédiaire. « Nous ne sommes à la recherche d’une plus grande vitesse de décision mais d’une rapidité de mise en œuvre », expliquait John Chambers. Certes Cisco n’est plus le leader technologique que l’on a connu, mais elle reste une société largement profitable. Sur l’année fiscale 2013, clôturée fin juillet, Cisco a réalisé un chiffre d’affaire de 48,6 milliards de dollars en croissance de 5 % par rapport à l’année précédente, mais surtout un bénéfice net de 10 milliards de dollars contre 8 milliards en 2012. Dans de telles conditions, on a quelques difficultés à comprendre cette décision de suppression de postes. Et on se demande quel trésor d’ingéniosité l’entreprise va employer pour l’expliquer à ses salariés.

Un peu à l’instar d’IBM, Cisco s’est lancé dans un programme de rachats d’actions pour stimuler le titre et a poursuivi son programme d’acquisition à un niveau élevé avec notamment le rachat d’Ubiquisys Limited, JouleX, Composite Software, Sourcefire, SolveDirect Service Management GMbH. A la dernière conférence de partenaires de Microsoft, Cisco a annoncé qu’elle s’associait avec Microsoft pour accélérer le déploiement d’infrastructure de clouds privés et hybrides.