Michel Sapin, ministre des Finances et des Comptes publics, et Emmanuel Macron, ministre de l’Economie, de l’Industrie et du Numérique, ( photo ci dessus) viennent de lancer une concertation pour définir une stratégie nationale des moyens de paiement.Première victime à sacrifier sur l’autel de la modernisation, le chèque, soupçonné de ralentir « un peu », l’économie.
Michel Sapin et Emmanuel Macron ont confié à Emmanuel Constans, selon le site du gouvernement (http://www.economie.gouv.fr/moderniser-moyens-paiement), le président du Comité consultatif du secteur financier, la mission de préparer avec tous les acteurs concernés la tenue des Assises des paiements qui se tiendront au printemps 2015.
Déjà en 2013, le secteur financier s’était réjouit du fait que cet événement pourrait se dérouler sous l’égide du ministre de l’Économie et des Finances. Le ministre de l’économie ne cesse d’ailleurs de promouvoir les nouvelles solutions de paiements, gages de simplification des échanges commerciaux. Le grand chantier pour moderniser les moyens de paiement, si l’on fait confiance aux ministres, devrait faire baisser leurs coûts et les rendre plus sécurisés, au moins pour ce qui concerne les échanges sur Internet. Et cela pourrait passer par une disparition du chéquier. Cette réforme est très attendue par les banques françaises qui dépensent prés de 2,5 milliards d’euros par an pour les traiter ou du moins les sous traiter,pour l’essentiel. A l’heure des porte-monnaie électroniques, la France reste le premier utilisateur de chèques de l’Union européenne, avec près de 66 % des émissions, devant le Royaume-Uni (20 %). Pourtant la France n’est pas rétrograde dans le commerce électronique, elle a même été l’un des promoteur de la carte à puce et des échanges sécurisés. Cette apparente avance tenait surtout à l’adoption du minitel ,dés 1986 , qui fut le premier terminal gratuit apte à faciliter le paiement électronique et la consultation payante d’informations.
Une évolution réelle mais trop lente
Cela fait des années que la communauté bancaire favorise le paiement par carte et les habitudes de consommation ont déjà pas mal changé. Depuis les années 2000, le nombre de chèques n’a jamais cessé de baisser et l’usage de la carte bancaire a poursuivit sa progression, y compris pour le règlement de petits montants, grâce en partie au service Monéo. Alors qu’en 2006, la moyenne par an était de 60 chèques signés par utilisateur, celle ci a baissé jusqu’à 37 chèques, en 2013.
Mais le paiement électronique se heurte toujours à la gratuité des chèques et les consultations effectuées par EDC (Edgar, Dunn & Company) pour le Comité consultatif du secteur financier et la banque de france, ne disent pas autre chose: « OK pour supprimer les chèques mais donnez nous une autre solution gratuite ». (https://www.banque-france.fr/ccsf/fr/publications/telechar/autres/Chapitre-6-Concertations-avec-les-parties-prenantes.pdf)
Le chèque peut disparaitre à condition que son successeur soit gratuit
Selon les associations de consommateurs consultées par EDC , la majorité sont en faveur du statut quo ou d’une disparition lente du chèque à condition de la mise en place d’une alternative crédible et gratuite.
Pour les associations d’entreprises et de commerçants les avis sont parfois différents même s’ils reconnaissent que le chèque génère plus d’avantages en paiement qu’en encaissement. Il représente des couts fixes et des sources d’erreurs. Les impayés, en particulier, constituent une gestion lourde en comptabilité pour les entreprises. Mais les grands commerçants sont contre une disparition lente du chèque, et favorables à certaines initiatives de remplacement. La carte bleue avec ses transactions plus longues aux caisses, surtout en période de fêtes, n’est pas la solution miracle. Pour les commerçants traditionnels, il faudrait une vraie alternative au chèque pour les achats en magasin.
Un printemps 2015 sous le signe de l ‘économie
Le ministre de l’économie, Emmanuel Macron, qui rappelons le a l’expérience de quatre ans comme banquier d’affaires chez Rothschild & Cie, est un fervent partisan de l’entreprise dynamique et de la modernisation des modes de paiements . Mais aura t-il le temps de supprimer les chèques ? De l’avis de tous, l’opération n’aura pas lieu avant 2017, date des élections présidentielles. Alain Juppé, l’un des opposants du gouvernement navait pas ’hésité pas à dire que le gouvernement ne pourrait plus prendre de décisions économiques importantes, de peur de se fâcher avec ses électeurs. Un discours que réfutait le ministre sur les antennes de RTL à la mi-décembre. La fin du chèque ne pourrait se faire toute fois qu’avec l’accord des professionnels. Tout le monde a cependant dans l’esprit l’échec de la mise au rebut du chèque en Grande-Bretagne. Le gouvernement britannique avait essayé de fixer une date « couperet » pour mettre fin au chèque, mais elle est revenue sur sa décision sous la pression des associations.
Créer une carte de paiement gratuite pourrait être la solution. En particulier de nouvelles cartes avec un cryptogramme sur un micro écran led (alimenté par pile) dont le contenu changerait toutes les heures pourrait aussi améliorer les échanges électroniques.
Le paiement sans contact reste encore dans les limbes
Le paiement par téléphone selon le mode Apple Pay introduit par Apple finira bien par arriver mais le partage des responsabilités et des bénéfices reste un sujet de discussion sans fins entre opérateurs de télécommunications et banquiers.Même les rares banques qui s’étaient fait les chantres de cette évolution, se font désormais discrètes sur le sujet.
Toutes les formules pourront certainement se combiner, le succés d’une formule de règlement n’étant pas la garantie de la fin d’une autre. Il y a 20 ans déjà on annonçait déjà la disparition de l’argent liquide grâce au porte feuille électronique.A ce propos, seule en Europe, la Suède qui avait d’ailleurs introduit les premiers billets de banques au XVeme siècle, vient d’autoriser certains établissements bancaires a ne plus distribuer de liquide et de refuser les versements.
L’acceptation d’un nouveau modèle de paiement n’est pas toujours facile
Rappelons que c’est la Révolution française qui, à la suite de la quasi-faillite financière de l’état, avait introduit l’assignat, l’ancêtre du billet de banque, menacé lui aussi de disparition dans les années à venir. C’est la loi du 15 mars 1791 qui avait ordonné l’échange des effets de la Caisse d’escompte (l’ancêtre de la banque de France) contre des assignats, qui étaient devenus ainsi le seul papier « monétaire ». A l’époque déjà, les nouveaux moyens de paiements suscitaient l’inquiétude, on leur préférait l’or et l’argent. A tel point que la Convention, le 8 avril 1793, avait décidé que les prix de tous les achats et marchés conclus avec l’État seraient stipulés uniquement en assignats.
La mesure avait été étendue, trois jours après au secteur privé. En septembre de la même année , époque connue pour être celle de la terreur, la non-acceptation de l’assignat était déclarée passible de la peine de mort et les biens des récalcitrants confisqués et le délateur récompensé. Si l’on est loin encore, des excès de la terreur ,dans le domaine bancaire, la disparition des chèques et des billets de banques pourrait bien créer des tensions encore insoupçonnées. La conviction des associations de consommateurs pour des solutions électroniques gratuites, comparables aux chèques, parait inébranlable. (à droite un assignat de 50 livres source http://sceco.univ-poitiers.fr/hfranc/images/assignat50L90.jpg)