La saga SCO contre IBM autour d’Unix devrait finalement se clore sur un règlement à l’amiable de plus de 14 millions de dollars. Pourtant, l’affaire a récemment vu naître une nouvelle branche qui poursuit cette saga juridique de plus de 20 ans dont les ramifications peuvent impacter Linux !

En Avril dernier, nous évoquions le procès intenté par Xinuos à IBM concernant le vol prétendu de propriétés intellectuelles autour de Unix. Cette action en justice est une nouvelle branche dans une saga complexe qui oppose Big Blue à la société SCO (et les structures qui en ont hérité) depuis 2003 !

Cette grande saga trouve son origine en 1998, à l’époque du Project Monterey : IBM, SCO, Intel et Sequent s’unissaient alors pour offrir une alternative moderne à UNIX. Mais le projet va tourner court, IBM retirant ses billes pour finalement produire son propre système AIX. C’est aussi une époque où des projets communautaires d’alternative à UNIX commencent à prendre de l’ampleur à l’instar d’un certain Linux (né en 1991 et porté par l’OSI créée en 1998) et d’un certain Free-BSD (né en 1993 à l’université de Berkeley).

SCO n’apprécie pas le départ d’IBM et accuse ce dernier d’avoir exploité du code SCO pour créer AIX et même d’avoir versé certains de ses codes dans Linux. Il en découlera une succession interminable d’actions en justice.

Cette grande saga a connu la semaine dernière un nième dénouement qui pourtant n’annonce pas sa fin, bien au contraire.

En effet, une requête en règlement du tribunal des faillites des États-Unis pour le district du Delaware stipule que les parties (TSC d’un côté et IBM de l’autre) « ont convenu de régler tous les différends entre elles par un paiement à l’administrateur de 14 250 000 dollars ».

C’est un peu une surprise dans le sens où il ne reste plus que des ruines de SCO, désormais renommée TSC après avoir vendu en 2011 ses propriétés intellectuelles à Xinuos : SCO s’est placée en protection contre les faillites (le fameux « Chapter 11 ») en 2007 avant que le fonds Stephen Norris Capital Partners ne vienne en 2008 réinjecter de l’argent frais dans le seul et unique but de poursuivre les poursuites à l’encontre d’IBM.

L’accord doit encore être officiellement signé mais cette étape ne devrait pas poser problème. IBM est probablement satisfait de pouvoir clore ce chapitre alors que l’entreprise est engagée dans un split historique en deux entités pour cette fin d’année. De l’autre côté, « l’entente de règlement prévoit un recouvrement monétaire immédiat et substantiel et crée d’importantes liquidités au profit de tous les créanciers et demandeurs », explique le document alors que l’issu d’un procès reste « incertaine ».

Toutefois cet accord ne signe pas la fin de la saga ! SCO a en effet en 2021 vendu ses propriétés intellectuelles à une autre entité UnXis depuis devenue Xinuos, éditeur d’OpenServer 10 (qui dérive de Free-BSD) dont la clientèle semble avoir fondu comme neige. En avril dernier, Xinuos a déposé une nouvelle plainte contre IBM étendant désormais ses reproches non seulement autour d’IBM Linux mais aussi de Red Hat Linux (IBM ayant racheté Red Hat) et même d’AIX. Car Xinuos a une relecture très personnelle de l’histoire informatique de ces 30 dernières années : « D’abord, IBM a volé la propriété intellectuelle de Xinuos et a utilisé cette propriété volée pour construire et vendre un produit en concurrence avec Xinuos lui-même.  Deuxièmement, IBM et Red Hat ont illégalement accepté de se diviser le marché en s’appuyant sur les propriétés intellectuelles volées et d’utiliser leur puissance croissante sur le marché pour « victimiser » les consommateurs, les concurrents innovants et l’innovation elle-même. Troisièmement, après que IBM et Red Hat aient lancé leur conspiration, IBM a ensuite acquis Red Hat pour consolider et pérenniser leur projet… Xinuos affirme que la conspiration d’IBM et de Red Hat a nui à la communauté open source et plus particulièrement au produit OpenServer 10 de Xinuos, basé sur Free-BSD » …

Autrement dit, si « l’affaire SCO » semble bien sur le point de se conclure, « l’affaire Xinuos » elle demeure. Difficile de prédire si le règlement de l’une aura une influence sur l’autre. La saga se poursuit donc. Car des milliards sont en jeu. Si Xinuos venait à l’emporter, l’entreprise pourrait potentiellement revendiquer des propriétés intellectuelles sur Linux !