Coup sur coup, l’Europe a statué contre Apple et contre Microsoft. Le premier est accusé d’avoir bien enfreint les règles du DMA avec ses règles anticoncurrentielles de l’App Store. Le second d’avoir violé les lois antitrust européennes en agrafant Teams à ses offres Office 365 et Microsoft 365. Les deux géants de la Tech risquent des amendes records.
C’est tout sauf une surprise. Alertée par de multiples concurrents, l’Europe avait – depuis de nombreux mois – lancé des investigations approfondies sur les pratiques d’Apple autour de son App Store et sur celles de Microsoft autour d’un Teams « bundlé » par défaut à ses outils collaboratifs Office 365 et Microsoft 365.
Ces règles discutables de l’App Store et des plateformes Apple
Apple a bien tenté quelques concessions pour s’aligner sur les règles du DMA tout en essayant de les limiter autant que faire se peut afin de préserver cet essentiel business qu’est l’App Store, tour de contrôle des services sur ses plateformes. Avec un argument de choc, mais un rien fallacieux, qu’ouvrir l’App Store mettait mécaniquement les utilisateurs Apple en danger et fragilisait la cybersécurité de ses plateformes. Des arguments insuffisants et surtout des concessions accordées apparemment jugées totalement insuffisantes par les Européens.
La Commission européenne a en effet annoncé cette semaine que non seulement les règles de gouvernance de l’App Store ne sont pas conformes au DMA (Digital Market Act) mais aussi qu’elle allait lancer une enquête supplémentaire pour non-conformité concernant les frais que les développeurs Apple doivent payer pour distribuer leurs applications en dehors de l’App Store.
Ce que la commission reproche principalement à Apple, c’est d’interdire une libre information des clients sur les possibilités d’acquisition à moindre prix d’offres proposées hors de l’App Store.
Apple va devoir défendre son cas (et fera fort probablement appel dans un second temps) pour ne pas devenir la première entreprise mise à l’amende pour non-respect du DMA : elle risque en effet jusqu’à 10% de son Chiffre d’Affaires mondial ! On rappellera au passage que Google fait également l’objet d’une enquête similaire autour des règles de son Google Play Store.
Margrethe Vestager, vice-présidente exécutive en charge de la politique de concurrence, a déclaré : « La communauté des développeurs et les consommateurs sont impatients de proposer des alternatives à l’App Store. Nous enquêterons pour nous assurer qu’Apple ne sape pas ces efforts. »
Le bundle de trop pour Microsoft
Tout aussi prévisible, l’accusation de la Commission européenne contre Microsoft risque là encore de coûter très cher à l’éditeur. Celui-ci le sait bien et avait dès la fin de l’année dernière annoncé finalement retirer Teams de ses offres Office 365 et Microsoft 365 d’abord en Europe puis finalement partout dans le monde. Sauf que cette décision arrivait bien trop tard et que finalement le mal était fait depuis longtemps. Et la Commission européenne ne sait pas laisser berner. Dans ses constatations préliminaires, le régulateur de l’UE a expliqué que la façon dont Microsoft a lié la distribution de Teams à ses applications collaboratives dominantes a pu empêcher les alternatives à Teams, telles que Slack et Zoom, de concurrencer son offre sur un pied d’égalité.
Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que Microsoft se fait taper sur les doigts pour ses pratiques anticoncurrentielles qui consistent le plus souvent à attacher de nouveaux produits à des offres existantes bien implantées, histoire d’étouffer la concurrence. Internet Explorer et le lecteur multimédia ont déjà été dans le collimateur de l’Europe, tout comme OneDrive…
Microsoft peut maintenant répondre par écrit à la déclaration d’objections de la Commission et demander une audience pour défendre sa cause. Si elle aura bien du mal à convaincre la Commission qu’elle n’a pas enfreint les règles de concurrence de l’UE (Teams a été bundlé avec ses outils bureautiques entre 2016 et 2023, et ne parlons pas de son intégration à Windows 11), elle pourrait néanmoins réussir à atténuer la sévérité de l’amende. Car comme Apple, Microsoft risque – dans le pire des cas – une amende pouvant aller jusqu’à 10 % de son chiffre d’affaires annuel mondial.
Entre les défenses des géants de la Tech et les différents recours possibles, les amendes ne tomberont pas de sitôt. Mais elles s’annoncent record. Affaire à suivre…