En un an, le big data a progressé de manière significative dans les entreprises françaises et les fonctions sont professionnalisées.
Tel est le constat proposé par Reda Gomery, Associé responsable Data et Analytics chez Deloitte en marge de la présentation des résultats de la deuxième enquête réalisée par le cabinet auprès d’entreprises françaises. Toutefois, ces dernières restent en retard par rapport à leurs concurrences anglo-saxonnes.
L’année dernière, les entreprises ont investi dans diverses initiatives autour des données, principalement afin d’améliorer l’efficacité opérationnelle ou encore la prise de décision. Poussés par une transformation digitale active des entreprises, les investissements en matière de données devraient s’intensifier en 2016. Parmi les principaux résultats de cette enquête, on peut mentionner :
– 60% des entreprises interrogées estiment avoir une bonne compréhension des apports du Big Data pour leurs organisations.
– Elles sont 43% à considérer qu’une telle pratique devrait être menée par une entité dédiée placée sous la responsabilité de la Direction Générale et près de 8 entreprises sur 10 considèrent qu’il est urgent de renforcer le rôle du Data Scientist et 71% celui du Chief Data Officer. « Dans le Top100, de nombreuses entreprises ont nommé un CDO parmi lesquelles on peut mentionner L’assureur Axa, Publicis, la BNP… ».
C’est en novembre dernier qu’Axa a nommé son CDO. Ce dernier est directement rattaché à la COO de l’entreprise et a pour mission de « de renforcer les capacités du Groupe en matière de données : il sera en charge de la stratégie et de la feuille de route au niveau mondial, du développement des CDO locaux et régionaux ainsi que de la construction du positionnement du Groupe sur des aspects structurants tels que protection des données personnelles, architecture des données et orientations technologiques ».
Il y a CDO et CDO
D’ailleurs, il ne faut pas confondre Chief Data Officer et Chief Digital Officer (bien que l’acronyme soit le même et que alors qu’on attend la francisation des termes), rappelle Reda Gomery. le premier est responsable des données alors que le second est en charge de la transformation numérique.
Ces initiatives autour des données peuvent être aussi motivées par les nombreux aspects réglementaires qui se sont développées ces dernières années dans les différents secteurs (Bale, BCBS 329[1] dans la banque, Solvency dans l’assurance) et qui s’imposent aux entreprises auquel va bientôt s’ajouter la loi sur la protection des données personnelles au niveau européen. La mise en place d’un CDO n’est pas tâche aisée car c’est un profil complexe qui requiert des compétences multiples et pointues dont les entreprises ne savent pas toujours définir les contours précisément et quelle place lui attribuer dans l’organisation.
En parallèle à la réglementation, Reda Gomery, « les entreprises prennent conscience des divers risques liées aux données ainsi que des divers risques liés aux données ainsi que de l’extrême sensibilité des consommateurs sur la question ». Pour le consultant de Deloitte, cet usage éthique des données va au-delà de la simple prise en considération des conséquences que les pertes de données ou hacking peuvent avoir sur l’image de l’entreprise. Mais il reconnait qu’elles ont toujours beaucoup de difficultés à communiquer en toute transparence sur ces sujets.
– Plus de 70% des entreprises indiquent avoir déjà lancé des initiatives de big data. Et dans ces projets, les données externes suscitent un intérêt grandissant (données issues du Web, des réseaux sociaux, des partenaires…). Une entreprises sur deux considèrent qu’il devient prioritaire d’acquérir de plus en plus de données externes et d’en favoriser le croisement avec les données internes. De ce croisement peuvent naître des informations extrêmement utiles. Reda Gomery donne comme exemple le croisement des données issues des banques et des opérateurs télécom : le retrait de billets avec un portable distant de plus d’un mètre. D’après Deloitte, plusieurs organisation considèrent avec beaucoup d’intérêt l’usage de données (géolocalisation, transaction de paiement, open data…) issues de partenaires. Ces partages des données dans le cadre d’échanges ou de monétisation doivent évidemment être régulés et respecter la confidentialité. D’ailleurs, les techniques d’anonymisation sont de plus en plus pointues.
Et vinrent les objets connectés !
Dans cette évolution vers le big data, les objets connectés vont un rôle central. Parmi les secteurs qui sont en pointe, Deloitte cite l’énergie, l’automobile et la santé. Mais ces objets ne sont pas sans poser quelques défis. D’abord savoir comment gérer l’identité de ces objets, explique Reda Gomery, comment en gérer la sécurité et l’accès, comment récupérer les bonnes données, à quelle fréquence ? Va également se poser la question du protocole de communication avec les objets ?
Pour preuve de l’importance des réseaux sociaux et des objets connectés, Télécom Ecole de Management vient de créer une chaire spécialement consacrée à ces sujets (Télécom Ecole de Management lance la Chaire « Réseaux Sociaux et Objets Connectés ») en partenariat avec le Groupe SEB et Huawei.
Enfin dans cette marche vers le big data, les applications intègre aussi des améliorations notables, notamment dans les domaines de la découverte des données (data discovery) et de visualisation (data visualisation) avec des offres en mode de plus en plus accessibles et simples à utiliser.
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[1] le Comité de Bâle sur le contrôle bancaire (BCBS) a publié le 9 janvier 2013 des recommandations, dites BCBS 239 : 14 principes ont été énoncés visant à renforcer la capacité des banques à agréger les données risques et à améliorer les pratiques de reporting qui leur sont relatives. 11 de ces principes concernent les établissements bancaires d’importance systémique au niveau mondial (G-SIBS) et 3 concernent les autorités de contrôle.