Un géant en devenir ? Cerebras Systems se voit déjà en grand concurrent de Nvidia et dépose un dossier d’introduction en bourse pour s’offrir les moyens de ses ambitions.

Le fabricant de puces d’intelligence artificielle Cerebras Systems annonce avoir déposé un dossier pour une introduction en bourse (IPO), avec l’intention de s’inscrire au Nasdaq sous le symbole « CBRS ». Fondée en 2016 à Sunnyvale en Californie, la société cherche à se positionner en acteur majeur des accélérateurs IA face à l’omniprésent Nvidia bien sûr, mais aussi face à AMD et ses Instinct MX ainsi qu’Intel et ses Gaudi 3.

Une technologie spectaculaire pour l’IA

Cerebras est reconnue pour son gigantesque (par la taille) processeur, le Wafer-Scale Engine 3 (WSE-3). Comme son nom le suggère, WSE est le plus grand processeur au monde, intégrant une seule puce de la taille d’une plaquette entière de silicium (Wafer). Sur le papier, ce processeur qui mesure 46 cm2 permet de réduire les temps de formation des modèles d’IA et la latence d’inférence, tout en diminuant la complexité de programmation.
Les chiffres sont d’ailleurs affolants : Le WSE-3 est 57 fois plus grand que le plus grand GPU, possède 52 fois plus de cœurs de calcul, 880 fois plus de mémoire haute performance embarquée et affiche une bande passante interprocesseurs 3715 fois supérieure ! Il contient 4 mille milliards de transistors, 900 000 cœurs optimisés pour l’IA, 44 Go de mémoire vive et des bus cœur à cœur offrant une bande passante de 214 Pb/s (pétabits par seconde). C’est sûr, ça décoiffe. Selon Cerebras, il est 20x plus rapide en inférence que des GPU H100 pour un cinquième du prix !

En plus de ses puces, Cerebras propose des services cloud basés sur ses propres supercalculateurs d’IA.

Des performances financières en forte progression

Au premier semestre 2024, Cerebras a réalisé un chiffre d’affaires de 136,4 millions de dollars, contre 8,7 millions de dollars sur la même période en 2023. Malgré cette croissance significative des revenus, la société a enregistré une perte nette de 66,6 millions de dollars, légèrement inférieure à la perte de 77,8 millions de dollars de l’année précédente. Pour l’ensemble de l’année 2023, le chiffre d’affaires s’élevait à 78,7 millions de dollars avec une perte nette de 127,2 millions de dollars.

L’augmentation des dépenses opérationnelles, notamment en personnel pour soutenir la croissance, a contribué aux pertes. Cerebras a souligné que la majorité de ses revenus provenait d’un seul client, Group 42 (G42), une entreprise d’IA basée aux Émirats arabes unis et investisseur de Microsoft. G42 a représenté 83 % des revenus en 2023 et s’est engagé à acheter pour 1,43 milliard de dollars de produits Cerebras avant mars 2025.

Les principaux investisseurs de Cerebras incluent Foundation Capital, Benchmark, Eclipse Ventures, Alpha Wave, Coatue et Altimeter. Des personnalités comme Sam Altman, PDG d’OpenAI, et Andy Bechtolsheim, co-fondateur de Sun Microsystems, font également partie des investisseurs. Andrew Feldman, co-fondateur et PDG de Cerebras, est le seul individu détenant plus de 5 % des parts.

L’offre publique initiale sera dirigée par Citigroup Global Markets et Barclays Capital, sans la participation habituelle de Morgan Stanley ou Goldman Sachs. Les détails concernant le nombre d’actions offertes ou leur prix n’ont pas encore été divulgués.

Un marché concurrentiel et des défis à relever

Cette IPO annoncée et le fulgurant succès de Nvidia ces 2 dernières années ne doivent cependant pas faire perdre de vue que le marché des accélérateurs IA est un marché très concurrentiel et très difficile. Il suffit de voir à quel point Intel et AMD rament pour exister à côté de Nvidia qui verrouille le marché par sa technologie CUDA pour laquelle toutes les bibliothèques ML et Deep Learning sont aujourd’hui optimisées.

Il y a une intense quête à la performance qui s’accompagne d’une quête à la moindre consommation électrique et d’une quête à l’optimisation des coûts. Les défis sont suffisamment imposants pour justifier que les hyperscalers développent leurs propres accélérateurs qui constituent autant de concurrents pour Cerebras. Google a ses TPUv5, AWS ses puces Inferentia et Trainium, Azure ses puces Maïa100.

Cerebras reconnaît d’ailleurs la férocité, la multiplicité et la diversité de ces concurrents dans son dossier d’IPO. L’entreprise souligne également les défis liés à une chaîne d’approvisionnement des semi-conducteurs saturée alors que ses puces sont fabriquées par l’incontournable TSMC déjà bien occupé par la fabrication des puces Apple, Qualcomm, AMD, notamment.

Certains espèrent néanmoins que cette IPO marquante va enfin redynamiser un marché des IPO technologiques plutôt fébrile en 2024. Avec sa technologie innovante et ses partenariats stratégiques, la société espère attirer les investisseurs et renforcer sa position face aux géants établis. Le pari est osé, l’ambition… démesurée ?

 

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