Contre vents et marées, le métacloud européen poursuit sa route semée d’embuches. Il vient de publier son framework de conformité et de labélisation. Une étape importante avant l’apparition des premiers services labélisés Gaia-X en 2022.

Le métacloud européen Gaia-X est un projet ambitieux construit autour de trois principes fédérateurs : transparence, souveraineté, interopérabilité. Et ce métacloud reste une belle idée malgré les récentes polémiques à son sujet.

Il est vrai que la diversité de ses membres qui comportent à la fois des acteurs européens et des acteurs internationaux rend particulièrement lourde et complexe sa gouvernance ainsi que la mise en place de solutions à même de satisfaire au plus grand nombre.

Par ailleurs, pour certains observateurs, la présence des géants internationaux est incompatible avec l’idée d’une souveraineté européenne. Stanislas de Rémur, PDG d’Oodrive, confiait récemment, « ne plus être très sûr que le projet Gaia-X aide notre indépendance numérique ». Et la semaine dernière, Scaleway claquait bruyamment la porte de l’association affirmant que l’entreprise avait mieux à faire des capitaux investis dans Gaia-X et que « les objectifs de l’Association, quoique louables au départ, sont de plus en plus détournés et contrariés par un paradoxe de polarisation ayant pour conséquence de renforcer le statu quo, c’est-à-dire une concurrence déséquilibrée ».

Suite à cette défection remarquée, Francesco Bonfiglio, le président de l’association Gaia-X, a réagi en assurant que « nous sommes ouverts à tous, mais nous avons un contrôle strict sur notre conseil d’administration, notre mission et notre vision et il n’existe aucun moyen de nous hijacker ». Il ajoutait surtout « quiconque croit que la solution pour une confiance numérique européenne consiste à fermer les portes aux non-Européens ne comprend pas ce qui se passe aujourd’hui dans le monde de la Global Data ».

Le projet Gaia-X poursuit donc son travail… à un rythme pachydermique. Le métacloud vient ainsi de publier son framework de conformité et labélisation qui permettra dès l’année prochaine à différents fournisseurs de servir cloud de s’estampiller « Gaia-X » tout en affichant un label précisant son niveau de conformité. Ce framework combine le respect des « Policy Rules » qui guident le métacloud, le respect des concepts et services techniques qui servent de fondation commune à tous les services cloud Gaia-X, et le respect du principe des « Data Spaces » (espaces de données conçus pour faciliter et sécuriser l’échange de données selon des principes très européens de préservation de la confidentialité et dans le respect du RGPD).

Le framework de conformité et labellisation Gaia-X définit ainsi 3 niveaux de conformité :
– « Gaia-X Level 1 » est le niveau de base qui garantit que le service adhère bien aux principes fondateurs et techniques de Gaia-X.
– « Gaia-X Level 2 » va au-delà pour refléter un plus haut niveau de transparence et de sécurité, les services ‘Level 2’ devant aussi nécessairement proposer une option permettant aux entreprises de s’assurer que traitements et données sont réalisés sur le sol Européen.
– « Gaia-X Level 3 » va encore au-delà et prône la souveraineté européenne. C’est un peu l’adaptation façon « Gaia-X » du « Cloud de Confiance » de la France. Le ‘Level 3’ garantit une localisation et une opérationnalisation européenne des services mais également une immunité aux lois non-européennes.

Le Graal pour tous les opérateurs sera donc de rechercher le « Level 3 ». Et les hyperscalers américains et chinois pourront probablement le conquérir au travers de leurs associations avec des acteurs européens tels que Bleu (formé par Orange, Capgemini et Microsoft) ou la nouvelle association Thalès/Google. Il n’est pas exclu d’ailleurs que le label « Gaia-X Level 3 » soit bien plus facile à obtenir que la certification « SecNumCloud » de l’ANSSI et que bien des opérateurs cherchent désormais à se battre pour le label « Gaia-X Level 3 » plutôt que pour le label « Cloud de Confiance ». Tout dépendra de la capacité de Gaia-X à passer de la théorie à la pratique. Les premiers services estampillés « Gaia-X » sont attendus en 2022.