Il fallait s’y attendre. La capacité des IA génératives à rédiger des textes à rallonge et à affabuler est largement exploitée par certains auteurs pour produire des histoires, des livres, en un temps record. Les exemples commencent à se multiplier définissant les contours d’un nouveau phénomène qui pourrait, à nouveau, bouleverser le monde de l’édition…

Il y a quelques jours, le Washington Post s’inquiétait de voir proliférer sur les sites d’autopublication comme Amazon KDP, PublishRoom ou Librinova, des livres produits par des IA. Le journal raconte notamment la mésaventure d’un développeur qui s’apprêtait à sortir un livre technique sur lequel il travaillait depuis plusieurs mois pour découvrir qu’un autre livre avec le même titre avait été publié juste avant mais dont le contenu était clairement produit par ChatGPT.

Le fait est que les contenus produits par les IA génératives se multiplient sur la toile : brèves sur les sites d’actualité, posts sur les réseaux sociaux, horoscopes sur des sites comme ceux de horoscope.com et astrology.com, fiches de présentation de produits sur les sites de e-commerce et désormais livres et essais sur les sites d’autopublication.

Newsweek relate ainsi l’expérience de Tim Boucher. Grâce aux IA génératives, ce dernier a produit en neuf mois 97 nouvelles de 2000 à 5000 mots illustrées grâce à des images produites par l’IA. Chaque nouvelle, commercialisée sous forme de livre indépendant, lui a demandé entre 3 et 8 heures de travail à interroger ChatGPT d’OpenAI et Claude d’Anthropics pour l’aider au brainstorming et générer des chapitres entiers ou simplement des paragraphes et réaliser des illustrations avec MidJourney.

« L’IA s’est révélée être un remarquable catalyseur pour mon travail créatif. Elle m’a permis d’augmenter ma production tout en maintenant une qualité constante, et de me plonger dans la construction de mondes complexes avec une efficacité que je n’aurais jamais pu atteindre autrement. J’ai pu donner vie à des histoires et à des univers narratifs que j’avais en tête depuis des années. J’ai même utilisé l’IA pour m’aider à coder des mini-applications qui permettront de rationaliser et d’accélérer le processus créatif à l’avenir » explique Tim Boucher.

Il reconnaît cependant que l’exercice a ses limites. Selon lui, il faut apprendre à maîtriser ces technologies et leurs défauts, notamment pour mettre à profit certains défauts afin de trouver de nouvelles pistes. Il reconnaît aussi que « les IA actuelles éprouvent bien des difficultés à écrire de longs textes en maintenant une intrigue cohérente ou à développer des arcs narratifs complexes pour les personnages. C’est pourquoi je compose plutôt de courts recueils de fictions entrecoupés d’entrées encyclopédiques fictives pour construire le monde et l’histoire ».

Tim Boucher commercialise ses livres entre 1,99$ et 3,99$ à travers le site Gumroad. Chaque livre s’auto-référence les uns et les autres créant un univers complexe et invitant surtout les lecteurs à acquérir les autres volumes. Tim Boucher avoue avoir gagné 2.000$ en neuf mois, ayant écoulé 574 copies de ses livres sans la moindre promotion.

Son cas n’est certainement pas isolé. Le site de publication dédié à la SF, Clarkesworld, explique qu’avant le phénomène ChatGPT, il recevait environ 25 soumissions de livres par mois. Depuis février et la folie médiatique des IA génératives, ce nombre a été multiplié par 20 avec plus de 500 soumissions par mois!

Une pratique qui suscite bien des interrogations sur l’originalité, la variété des thèmes et la qualité des œuvres produites, mais aussi sur le respect des copyrights, les risques de plagiat, et la capacité des plateformes d’autoédition à s’adapter à ce phénomène.

 

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