Différentes annonces sont venues porter un coup de projecteur au futur de Windows sur les processeurs ARM. Un futur qui ne devrait cependant pas briller avant 2023…

Microsoft est bien conscient du potentiel des processeurs ARM et compte bien imposer Windows sur ces processeurs. Mais jusqu’à présent, ses efforts se sont avérés assez décevants. Et même si la Surface Pro X, seul appareil de la gamme Microsoft équipé de processeurs ARM, est un bel outil, le manque de performances de son processeur et le manque de maturité de l’écosystème ARM sous Windows viennent ternir l’expérience utilisateur.

Microsoft compte sur Windows 11 pour changer la donne. D’abord parce que Windows 11 est optimisé pour les architectures « BIG.Little » – qui combinent cœurs performants et cœurs économes – initiées par ARM et désormais aussi adoptées par Intel avec ses Core i de 12eme génération.
Ensuite parce que Windows 11 dispose d’une émulation x64 permettant aux machines ARM d’exécuter les applications Windows de l’univers Intel aussi bien celles en 32 bits que celles en 64 bits (Windows 10 n’émule que les applications Intel 32 bits).

Un SDK pas cher mais peu performant

L’éditeur doit également encourager tout l’écosystème applicatif Windows à basculer en mode ARM. Paradoxalement, la migration d’Apple vers ARM sert aussi l’univers Windows. Car les développeurs sont désormais plus impliqués dans le portage de leurs codes Intel vers ARM maintenant que l’écosystème Mac est contraint d’y basculer.
Pour encourager le mouvement, Microsoft propose sur son Store (américain uniquement) depuis la mi-novembre un kit de développement ARM : une machine dotée d’un processeur Qualcomm 7c (gen 1, le SC7180) pour 219 dollars.
Destiné aux développeurs, ce PC se révèle poussif mais suffit pour vérifier le comportement d’une application. Toutefois on reste pour le moins surpris du manque de cohérence de Microsoft sur ce projet. La machine est livrée avec Windows 10 et non avec Windows 11. Et la mise à jour W11 nécessite de passer en mode Windows Insiders. Tout ça ne donne pas encore l’impression d’une forte implication de Microsoft sur le sujet ARM. L’éditeur continue d’avancer en tâtonnant…

Des alternatives au M1 d’Apple

Et ceci probablement parce que Microsoft est bien conscient que toutes ses tentatives resteront vaines tant que l’univers ARM n’offrira pas de processeurs assez puissants pour animer des PC avec des performances au moins égales à celles des PC Intel ou des nouveaux Mac. En lançant ses puces M1, puis les évolutions M1 Plus et M1 Max, Apple a jeté un énorme pavé dans la marre micro-informatique. Les puces d’Apple ont non seulement ridiculisé les processeurs Intel et AMD en matière de rapport performance par Watt mais elles ont aussi largement démontré le retard d’ARM, de Qualcomm et de MediaTek en matière de processeurs ARM pour ordinateurs portables.

Qualcomm a réagi en rachetant la startup Nuvia (pour 1,4 milliard de dollars) pour mieux s’éloigner des designs officiels d’ARM et proposer des alternatives crédibles aux Apple M1. La semaine dernière, le concepteur de processeurs mobiles a confirmé espérer finaliser le design d’une nouvelle génération de processeurs, conçue par Nuvia, vers la fin 2022 pour une disponibilité en 2023 sur les PC. Ces processeurs ont été spécialement pensés pour animer des ordinateurs et se montrer extrêmement compétitifs aussi bien face aux derniers processeurs Intel ou AMD mais aussi face aux Apple M1.  C’est l’ambition officiellement affichée par Qualcomm qui compte bien relever les seuils des benchmarks Windows. Le saut technologique devra cependant être spectaculaire. Les actuels processeurs dévolus au PC, les Qualcomm 8cx et 7c Gen 2 ne se montrent en effet pas à la hauteur des espérances.

MediaTek veut aussi entrer dans la danse

Et cela donne aussi des idées à MediaTek, l’autre grand fournisseur de processeurs ARM pour smartphones. Le leader des processeurs bon marché en est persuadé, à l’instar du Mac, l’univers Windows basculera un jour intégralement en ARM. « Apple a montré au monde que c’était possible » explique Eric Fisher, VP Business Development chez MediaTek. « Le partenariat Wintel (Windows+Intel) qui perdure depuis si longtemps est désormais sous forte pression. Et quand il y a de la pression, il y a des opportunités pour des entreprises comme la nôtre ». MediaTek vient d’annoncer sa génération Dimensity 9000 qui vient directement marcher sur les platebandes des Apple A15 et Qualcomm 888.  S’appuyant sur l’architecture ARMv9, cette nouvelle génération démontre une volonté de MediaTek d’aller désormais vers le haut de gamme (les flagships). Le fabricant de puces veut construire sur ses travaux autour du Dimensity 9000 pour développer des processeurs dérivés à destination des PC.

On a récemment appris que Qualcomm et Microsoft avaient, il y a quelques années, signé un partenariat exclusif autour du développement de Windows sur ARM. Cette exclusivité explique pourquoi MediaTek ne s’est pas intéressé plus tôt à l’univers PC mais aussi pourquoi Microsoft n’a officiellement produit aucun effort pour s’assurer de la compatibilité de Windows avec les M1 alors que bien des développeurs sont demandeurs. Selon XDA, cette exclusivité signée en 2016 est sur le point de s’achever ouvrant la porte au support natif de Windows sur une plus vaste gamme de processeurs ARM.

Pour colclure, l’onde de choc M1 continue de faire trembler l’univers de la micro-informatique au-delà du monde Apple. D’un côté, Intel a remis en route la machine à innover avec ses Core i12, de l’autre Qualcomm et Mediatek se retrouvent à muscler leurs designs. 2022 peut servir d’année préparatoire à l’écosystème « Windows on ARM » pour un véritable push en 2023 lorsque la nouvelle génération de puces sera réellement disponible. Microsoft vient en effet de lancer ses nouveaux frameworks (compatibles ARM), ses nouveaux outils de développement (Visual Studio 2022), et un système mieux adapté avec Windows 11. Reste à encourager les développeurs, intéresser les entreprises et proposer des PC sous ARM qui tiennent la route en matière de rapport qualité/prix, ce qui n’est pas encore le cas.