Après les annonces de la semaine dernière, les hyperscalers américains sont mis sur la touche quand il s’agit d’héberger des workloads d’administrations et d’OIV. Microsoft, en s’associant à Orange et Capgemini, est le premier à trouver une parade pour continuer à proposer ses technologies. Mais en réalité les clouds américains ont plus d’un atout dans leur manche…

Capgemini et Orange ont fait sensation hier en annonçant un partenariat visant à créer un nouvel opérateur cloud à même d’être certifié « Cloud de Confiance » et donc de pouvoir accueillir les workloads des administrations françaises, hôpitaux, collectivités locales et ceux des OIV (opérateurs d’importance vitale) et des OSE (opérateurs de services essentiels) tout en offrant les garanties techniques et juridiques imposées par l’État français.

Dénommé « Bleu », ce nouvel opérateur va entrer directement en concurrence avec les deux prétendants actuels à la certification cloud de confiance : OVHcloud et 3DS Outscale. Mais il a un atout de taille en main… Un partenariat avec Microsoft qui lui permettra de proposer Microsoft 365 et l’ensemble des services Azure ! Ces technologies seront ainsi hébergées et opérées en France par une entreprise de droit européen et donc non soumise au Cloud Act.

Bleu est donc indirectement une réponse d’un des grands clouds américains aux velléités souveraines de la France et de l’Europe. Toutes les entreprises et tous les organismes publics vont pouvoir profiter des technologies Microsoft (que beaucoup utilisent quotidiennement depuis longtemps) tout en restant dans les contraintes imposées par l’État français. Bleu garantit une immunité à l’égard de législations extraterritoriales (à commencer par le Cloud Act américain), une indépendance économique et un contrôle exclusif des applications cloud à partir d’une infrastructure isolée, basée sur des centres de données situés en France et totalement indépendants de ceux de Microsoft.

Notez que ce n’est pas la seule carte à disposition de Microsoft. L’éditeur vient également d’annoncer lors de la Build la disponibilité de toute sa plateforme PaaS sous forme de containers déployables sur n’importe quel cluster Kubernetes. Aussi bien sur des infrastructures sur site que sur n’importe quel cloud français ou européen mettant à disposition des clusters Kubernetes as a Service. De quoi faire jouer la concurrence puisque cette solution permettra par exemple à des entreprises d’héberger leurs applications en technologie Azure sur des clusters Kubernetes hébergés sur les infrastructures de 3DS Outscale ou OVHcloud. Voire même de jouer une carte très hybride, OVHcloud ayant des accords avec VMware et Nutanix dont les plateformes cloud hybrides embarquent désormais Kubernetes.

Google Cloud joue également une carte similaire. Le cloud américain a signé un partenariat avec OVHcloud pour proposer sa plateforme hybride Anthos (avec ses services GKE, Knative, Cloud Run, etc.) sur le cloud français déjà certifié SecNumCloud. Au passage, il sera intéressant de voir ce que vont devenir les partenariats signés par Cagemini avec OVHcloud et ceux signés par OBS avec OVHcloud maintenant que ces deux acteurs ouvrent avec Bleu une concurrence directe.

Par ailleurs, Bleu devra aussi se confronter à la concurrence européenne. Car il est fort probable que Microsoft, Google et AWS trouvent des partenariats similaires avec d’autres acteurs européens qui pourront, en théorie, eux aussi bénéficier de la certification « cloud de confiance » même si – pour l’instant – l’ANSSI n’a attribué son « SecNumCloud » qu’à trois acteurs… tous français.