Wall Street a ses mystères et ses contradictions. Intel annonce des pertes historiques mais son action s’oriente à la hausse. AMD annonce de solides bénéfices mais son action recule. Mais Wall Street se montre aussi implacable que réaliste et sort Intel du Dow Jones pour le remplacer par… NVidia.
Alors que les US entrent dans la dernière ligne droite d’élections qui s’annoncent très tendues, la bourse comme le monde politique américain s’interrogent sur le déclin d’Intel. L’entreprise va mal depuis plusieurs années, mais la situation a encore empiré alors que le marché PC se reprend doucement et que l’IA accélère la croissance des concurrents.
Intel a annoncé en fin de semaine dernière la plus importe perte de son histoire ! Au troisième trimestre calendaire 2024 (Q3-2024), le fondeur a vu son chiffre d’affaires trimestriel reculer de 6,2% (par rapport à Q3-2023) et déclare des pertes records de 16,6 milliards de dollars !
Intel toujours dans la tourmente sans inquiéter Wall Street
Et pourtant, Wall Street a réagi à la hausse à ces résultats déplorables. Et ceci pour de bonnes raisons. D’abord, et c’est une surprise, les résultats de ce Q3-2024 sont en réalité supérieure aux attentes des marchés financiers. Ensuite, cette perte record est surtout le résultat d’une restructuration massive avec la suppression de plus de 15.000 postes (engendrant une perte de 2,8 milliards de dollars) et une dévaluation de ses actifs de 15,9 milliards de dollars (notamment liés à Gaudi et aux investissements sur la gravure Intel 7).
Or Wall Street semble confiant pour l’avenir d’Intel qui devrait vivre une année 2025 de transition vers la profitabilité. L’entreprise compte notamment sur la nouvelle technologie de gravure « Intel 18A » qui soit être opérationnelle dans la seconde moitié de 2025. Elle doit se traduire par un saut technologique pour ses propres processeurs mais aurait surtout séduit des acteurs comme AWS et Azure pour la conception de leurs futurs processeurs maisons.
Dans le détail, sur ce troisième trimestre 2024, la division « Client Computer Group » (autrement dit les processeurs CPU et GPU pour PC) affiche un Chiffre d’Affaires de 7,3 milliards de dollars (en baisse de 7%). C’est loin d’être un bon résultat alors que le marché retourne à une timide hausse mais la concurrence d’AMD et surtout des SnapDragon X de Qualcomm complique les affaires d’Intel.
En revanche les choses vont mieux aussi bien du côté de la division « Data Center & AI » (en croissance de 9% avec un CA trimestriel de 3,3 milliards portés par le démarrage des Xeon 6) que du côté de la division « Network & Edge » (en croissance de 4% avec un CA trimestriel de 1,5 milliard de dollars).
La division « Intel Foundry » (très handicapée par une dévaluation d’actifs de 3,1 milliards de dollars engendrant un déclin de 8%) affiche un CA trimestriel de 4,4 milliards de dollars.
Intel s’attend au dernier trimestre à des revenus de l’ordre de 13,4 milliards, soit des résultats encore en baisse par rapport à l’année précédente mais supérieurs aux anticipations de Wall Street. L’entreprise s’estime désormais bien dimensionnée pour renouer avec la croissance l’an prochain.
AMD va bien mais Wall Street en veut plus
Chez AMD, les ventes de sa division « Data Center » ont doublé ce trimestre et pour la seconde fois consécutivement. Le fabricant de puces CPU et GPU a déclaré un bénéfice trimestriel net de 771 millions de dollars (contre 299 millions de dollars, un an plus tôt) pour un Chiffre d’Affaires de 6,8 milliards de dollars en croissance de 18%. Portée par le succès de ses puces Epyc mais aussi par la montée en popularité de ses accélérateurs IA AMD Instinct, la division « Data Center » affiche une croissance de 122% pour atteindre un chiffre d’affaires trimestriel de 3,5 milliards de dollars. La division « Client » avec ses CPU Ryzen croit de 29% pour atteindre un CA de 1,9 milliard de dollars. En revanche la division Gaming décline de 69% pour un CA de 462 millions de dollars et celle de l’embarqué baisse de 25% avec un CA de 927 millions de dollars.
Des résultats qui n’ont pas convaincu Wall Street qui espérait un véritable boost des ventes avec l’IA mais surtout des perspectives, pour le quatrième trimestre, jugées peu ambitieuses, ce qui explique le recul d’AMD à Wall Street. AMD compte sur le lancement de son nouveau GPU MI325X pour concurrencer NVidia et ses GPU Blackwell sur le marché de l’IA dans les datacenters et le cloud.
Signe des temps, NVidia remplace Intel dans l’indice Dow Jones
Le Dow Jones Industrial Average (DJIA), souvent appelé Dow Jones, est l’un des indices boursiers les plus anciens et les plus suivis au monde. Créé en 1896 par les journalistes financiers Charles Dow et Edward Jones, il reflète la performance de 30 grandes entreprises américaines « représentatives » et cotées en bourse. Au fil des années, il est devenu l’un des indicateurs clés de la santé économique des États-Unis et l’un des grands baromètres de la confiance en l’économie américaine.
Intel avait intégré le Dow Jones en 1999 aux côtés de Microsoft permettant ainsi à l’indice de se moderniser en intégrant les grandes entreprises de la Tech.
Mauvaise nouvelle pour Intel mais signe indéniable des temps, à compter du 8 novembre 2024, Intel sera remplacée par NVidia dans cet indice. Un nouveau coup dur pour l’image du fondeur américain.