La rumeur courait depuis la semaine dernière et les indiscrétions du Wall Street Journal. C’est désormais officiel : Salesforce dépense une fortune pour s’offrir le hub collaboratif Slack.

27,7 milliards de dollars… C’est 10 milliards de plus que ce que le Wall Street Journal avait anticipé. Salesforce casse une nouvelle fois sa tirelire pour s’offrir la plus importante acquisition de son histoire.

Salesforce a déjà à son actif quelques grosses acquisitions : celle de MuleSoft en 2018 pour 6,5 milliards de dollars et surtout celle de Tableau en 2019 pour 15,3 milliards de dollars.

Un achat au prix fort

À plus de 27 milliards de dollars, voilà une acquisition monstre et record qui paraît un peu disproportionnée. Il est vrai que les indiscrétions du Wall Street Journal avaient artificiellement fait flamber la valeur de Slack ces derniers jours pour atteindre 25 milliards de dollars.

Slack vient d’annoncer ses résultats du troisième trimestre 2020 : le chiffre d’affaires atteint les 234,5 millions de dollars en croissance de 39% (par rapport à Q3 2019) mais avec toujours un déficit de 65 millions de dollars. Elle compte désormais 64 000 entreprises clientes payantes dont 1 080 dépensent plus de 100 000 dollars par an. La progression est notable mais peu spectaculaire par rapport aux progressions enregistrées par Teams (200%) et par Zoom (367%) en cette année pandémique.
À titre de comparaison, Adobe a annoncé cette année l’acquisition de Workfront pour 1,5 milliard de dollars. Autres éléments de comparaison, Teams compterait environ 750 000 entreprises clientes (et plus de 115 millions d’utilisateurs actifs).

En septembre dernier, le fondateur de Slack s’était montré étrangement pessimiste rappelant que la croissance liée à la crise n’allait pas durer et que les licenciements chez certains clients allaient impacter son Business. Et les plaintes déposées par Slack aux US et en Europe contre Microsoft pour concurrence déloyale avaient été perçues par de nombreux analystes comme une bouteille à la mer et l’expression d’un besoin de s’appuyer sur une structure ayant plus d’impact pour être en mesure de concurrencer le géant de Redmond.

À 27,7 milliards de dollars, les actionnaires de Slack font une belle opération. Selon les termes de l’accord, chaque actionnaire de Slack va empocher par action une somme « cache » de 26,79$ par action et recevoir 0,0776 part d’actions Salesforce.

Une union pour la Data

Marc Benioff, le directeur général de Salesforce, se montre bien évidemment très enthousiaste sur cette acquisition la qualifiant de « combinaison paradisiaque ». Il s’émerveille des possibilités ouvertes par la fusion des outils et données des deux entreprises.
Car bien plus que les usages bureautiques, ce sont les usages autour de la donnée qui sont ici privilégiés. Les chaînes DevOps et DataOps s’appuient sur une collaboration intensive entre les développeurs, les datascientists, les opérationnels. Et Slack est un outil de collaboration très bien implanté au cœur de ces approches modernes.

L’objectif de Salesforce est ainsi de faire de Slack la nouvelle interface utilisateur de son « Salesforce Customer 360 ». L’éditeur explique que Slack sera profondément intégré dans chaque cloud Salesforce. « En tant que nouvelle interface pour Salesforce Customer 360, Slack transformera la façon dont les gens communiquent, collaborent et agissent sur les informations client dans Salesforce » explique Marc Benuioff avant d’ajouter qu’ « ensemble, Salesforce et Slack façonneront l’avenir des logiciels d’entreprise et transformeront la façon dont tout le monde travaille dans un univers entièrement numérique et de n’importe où. »
Salesforce voit cette acquisition comme une opportunité pour créer « le système d’exploitation d’une nouvelle façon de travailler. Combinés, Salesforce et Slack offriront aux entreprises une source de vérité unique et une plate-forme unifiée pour connecter les employés, les clients et les partenaires entre eux ainsi que les applications qu’elles utilisent chaque jour au cœur de leurs flux de travail existants ».

Bref Salesforce a de grandes ambitions pour son nouveau hub collaboratif. Mais au-delà du potentiel de Slack pour le leader mondial du CRM, ce deal est aussi intéressant parce qu’il constitue de facto une base de comparaison pour nombre d’autres startups de l’univers de la collaboration à commencer par Zoom bien sûr mais aussi pour des acteurs comme Airtable (aujourd’hui concurrencé par Microsoft Lists), Asana, SmartSheet…

Salesforce n’est pas impacté par la crise

L’annonce du rachat de Slack a eu lieu en même temps que la publication des résultats de Salesforce pour son troisième trimestre fiscal 2021 clôturé le 31 octobre 2020.
L’éditeur enregistre un chiffre d’affaires trimestriel de 5,42 milliards de dollars en progression de 20% par rapport au même trimestre de l’an dernier. Les bénéfices nets s’élèvent à 1,08 milliards de dollars.
Des résultats supérieurs aux attentes du marché. L’entreprise anticipe une croissance de 17% au prochain trimestre (fiscal Q4 2021) et au premier trimestre de son exercice 2022.