Dans le cadre d’un voyage d’études, The IT Press Tour, j’ai pu, de la Californie, vous faire découvrir quelques sociétés très novatrices. Retour sur un voyage au cœur de la Silicon Valley.
Des loyers en hausse vertigineuse qui poussent les classes moyennes hors la ville vers des banlieues moins onéreuses, des SDF toujours plus nombreux dans les rues, des constructions à tous les coins de rues, une Silicon Valley toujours à la recherche de la Next Big Thing mais aussi dans la crainte du Big One[1], un modèle de création et de financement de startups qui tourne à plein régime infirmant la thèse selon laquelle la Terre est plate et dont le carburant intellectuel est toujours pompé dans l’université de Stanford, des frontières de plus en plus floues dans les possibilités offertes par les technologies, Uber et Airbnb qui viennent de nulle part mais sont présents partout, Apple qui va construire des voitures et Tesla qui en construit déjà, Google à la recherche de la vie éternelle mais aussi de revenus sonnants et trébuchants toujours plus substantiels, Facebook qui continue à construire la plus grande cour de récréation du monde où « tous les gars du monde ont décidé d’être copains ».
Bref, la région de San Francisco reste la terre des paradoxes où les projets les plus fous sont possibles, en tous cas envisageables et donc envisagés. Les technologies n’empêchant par les traditions, la Californie se prépare à Halloween avec autant d’attention et de minutie que la ville de New York.
Halloween au supermarché Lucky de Sunnyvale et au Chelsea Market de New York
Alors que les valeurs technologiques séduisent beaucoup moins les marchés financiers, les startups font largement appel au capital-risque. Au deuxième trimestre, les startups américaines ont levé, selon National Venture Capital Association, plus de 17 milliards de dollars, le plus haut niveau depuis la folle année 2000 de l’explosion de la bulle Internet. La disponibilité des liquidités et les fortes incertitudes de la bourse poussent les startups de retarder l’échéance de l’IPO, d’autant que les résultats récents sont loin d’être probants. Introduite il y a quelques jours, la société dans le stockage Pure Storage est en très légère hausse, loin des succès éclatants de certaines époques.
Mon précédent voyage de ce type dans la métropole mondiale de la technologie remonte à 2007, autrement dit une éternité. Le cloud n’existait pas vraiment même si Salesforce avait depuis longtemps intronisé et mis sur les rails le modèle du Software as a Service en expliquant au monde que le logiciel n’existait plus. Le smartphone était dans sa toute prime jeunesse. BlackBerry régnait encore maître sur ce marché en étant présent surtout dans les entreprises, essentiellement par son système d’email, mais Apple avait lancé pendant l’été son premier iPhone avec le succès que l’on a connu par la suite. Sur les 9 premiers mois de l’exercice 2015, Apple a vendu 183 millions terminaux pour un chiffre d’affaires de 122 milliards de dollars en croissance de 56 % sur l’année précédente. Sur les 3 premiers de l’annonce de la dernière génération fin septembre, Apple a écoulé 13 millions d’unités de ces toutes dernières versions, un nouveau record.
Twitter espérait devenir le SMS de l’Internet. Pour l’heure, la firme de Jack Dorsey, l’ex-nouveau CEO de la société de microblogging est en pleine tourmente avec un cours de son action en chute libre. Alors qu’elle avait atteint 74 dollars fin 2013 valorisant Twitter à plus de 40 milliards de dollars – un des plus importantes licornes -, elle est tombée à 30 dollars aujourd’hui. L’entreprise vient donc décidé un plan de licenciement sec de 8 % des 4100 emplois. Lorsque j’avais visité Twitter en 2007, le tweet était encore un oiseau rare et la compagnie ne comptait qu’une vingtaine de personnes. Les sociétés visitées dans le cadre de The IT Press Tour ont montré une diversité de ce toujours aussi dynamique écosystème, des startups qui malgré les petites tailles pensent pouvoir changer le monde et des sociétés déjà établies et côté en bourse qui font preuve d’une énergie sans faille. Petit florilège.
Anaplan : une société qui entend remplacer Excel. La difficulté est grande tant les habitudes des utilisateurs sont ancrées dans leur quotidien et qu’ils n’ont pas trop envie de jeter par-dessus bord leur compétence acquise pendant de longues années. Mais à l’inverse, les possibilités sont immenses tant le tableur est omniprésent pour de très nombreuses applications, certaines pour lesquelles il n’est sans doute pas le plus adapté de la même manière qu’une tenaille peut être utilisé pour enfoncer un clou et qu’un marteau sera toujours mieux adapté. Ces trois dernières années, Anaplan a connu une croissance fulgurante qui pourrait bien le conduire à de devenir le Salesforce de la planification.
Doug Smith, l’un des cofondateurs a eu la sagesse de se mettre en retrait pour nommer à sa place un plus jeune CEO. Il a alors nommé un Français – Frédéric Laluyaux – pour le remplacer. Une initiative suffisamment rare pour être mentionnée.
Datadog : deux Français – Olivier Pomel et Alexis Lê-Quôc – se lancent dans l’aventure de la High Tech qui viennent en Silicon Valley pour donner plus de chances à leur projet en bénéficiant du formidable écosystème de la Silicon Valley, notamment de ses ressources financières : ils ont pu ainsi lever 50 M$ ce qu’il n’aurait sans doute jamais pu faire en France. Est-il plus difficile de réussir pour deux diplômés de l’Ecole Centrale qui jouit du prestige que l’on sait en France mais qui passe plus inaperçue dans la Silicon Valley ? Apparemment non car l’entreprise a déjà fait la preuve de la pertinence de son approche. Datadog est un enfant du Cloud mais entend en devenir le gardien.
Metadata et Synata : deux jeunes sociétés qui essaient de bénéficient des nouvelles vagues technologies. Synata (Photo de Patrick White, co-fondateur & CEO ci-contre) s’appuie sur les technologies Graph pour réinventer le Search d’entreprise. Autonomy était le leader de ce secteur mais avec la suite que l’on connaît qui a nui à ce segment de marché. Google avec sa GAS (Google Appliance Search) s’y est également attaqué mais sans trop de motivations ni d’énergie. A quoi bon récolter quelques miettes lorsque les dollars coulent à flot du côté de la publicité. En auscultant les métadatas que l’on peut récolter dans les différentes applications, on peut découvrir les personnes qui sont importantes pour chaque salarié. On pourrait ainsi définir une sorte de cartographie des compétences de l’entreprise, un des vieux rêves de la vague du Knowledge Management dans les années 2000.
Metadata s’attelle au marché relativement mûr du marketing automation mais sans vouloir tout révolutionner mais juste améliorer les performances des systèmes existants. Là encore, la puissance de l’outil peut laisser pantois. A partir d’une simple adresse email, Medatata peut toutes les informations qui y sont attachées et sont disponibles sur le Web. Une simple adresse email est ainsi transformée en une description riche d’un contact devenu alors une cible bien mure pour le projet visé par l’entreprise.
Hortonworks déploie le modèle open source dans le monde Hadoop plus que jamais synonyme de big data et s’associe avec de nombreux partenaires sur trois des quatre phases du cycle : conception de l’architecture des différents modules, développement, distribution et support. ET c’est sur la dernière phase de ce cycle que la société réalise la quasi-totalité de ses revenus. Hortonworks est l’exemple type des résultats mitigés sur le terrain boursier alors que l’entreprise ajoute 25 % de clients chaque trimestre et les perspectives toujours plus prometteuses du big data.
Solix et AtScale entend bien contribuer au développement de l’environnement Hadoop, la première en déclinant son savoir-faire dans l’archivage traditionnel et AtScale vise à devenir le Business Objects du big data sans remplacer mais en complétant l’existant.
Hadoop va-t-il rendre obsolète les bases de données relationnelles ? Certainement pas, répond sans hésitation Gary Morgenthaler, expert patenté des SGBD et investisseur dans NuoDB : « Lorsqu’il faut garantir l’exactitude et la fiabilité des données, les bases de données relationnelles sont irremplaçables ». La technologie des SGBD était mature au terme de développements pendant quarante ans mais le cloud est arrivé bouleversant tous les repères. C’est ce à quoi s’attelle NuoDB. Les principes de base de l’architecture de la nouvelle base de données sont : une capacité à la demande, un fonctionnement simultanément dans différents pays, l’affichage de la même information partout, assurer la consistance des transactions dans chaque endroit et un déploiement plus rapide.
Delphix entend elle aussi apporter une réponse à ce problème du chaos des données mais plutôt du côté du développement et des tests. Avec Delphix, au lieu de faire une copie des données pour chaque équipe, il est possible de créer un environnement virtualisé des données de production sur lesquelles l’outil effectue un certain d’opérations (compression, déduplication…) et dans lequel les développeurs pourront venir puiser.
La conflagration des données est un des problèmes auxquels toutes les organisations sont confrontées, certaines plus que d’autres. Arcitecta vise à aussi y apporter une réponse. Le principe de base de la solution Mediaflux développée par Arcitecta est relativement simple : insérer une couche d’intermédiation entre l’utilisateur doté d’une interface de requetâge et les différents silos de données.
Le mobile est devenu le terminal de choix, très loin devant le PC avec une interface homme/machine totalement revisitée. Et pourtant, les technologies avec son cortège d’apps a supprimé certaines fonctionnalités du web traditionnel comme le lien profond qui permet d’aller directement sur une page. Branch Metrics s’est attaqué à résoudre ce problème et développé une technologie qui rétablit cette mécanique si précieuse pour les spécialistes du marketing. Car garantir un accès direct améliore largement les performances des campagnes.
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[1] Le séisme de 1906 à San Francisco désigne le séisme qui toucha principalement San Francisco au matin du mercredi 18 avril 1906. Il a été estimé à une magnitude d’environ 8,22, et son épicentre se situait à 12 km à l’ouest de San Francisco sur le système de faille se trouvant au large des côtes (Source : Wikipedia)