Les rapports d’impacts environnementaux de ces deux grands acteurs du numérique que sont Microsoft et Akamaï permettent d’apprécier les efforts écoresponsables réalisés mais aussi les défis que le numérique ‘Green IT’ doit encore relever.
À quelques jours d’intervalle, Microsoft et Akamai ont publié leurs « Sustainability Reports 2021 » affichant chacun une certaine transparence face à leurs efforts mais aussi leurs difficultés à devenir des entreprises plus durables. Des rapports « Green IT » qui sont importants alors que leurs entreprises clientes ont non seulement besoin de ces informations pour calculer l’impact de leur supply chain mais aussi besoin de trouver de l’inspiration et des solutions pour se montrer elles-mêmes plus éco-responsables notamment dans leurs activités numériques.
Microsoft illustre les challenges du « Scope 3 »
Pour la seconde année consécutive, Microsoft vient de publier son rapport annuel Développement Durable qui détaille les mesures, engagements et nouveaux résultats concrets en la matière. Rappelons que l’entreprise s’est fixée pour objectif d’afficher un bilan carbone négatif, un bilan eau positif et d’atteindre un fonctionnement « zéro déchet » d’ici 2030 !
Ainsi, l’entreprise a retiré 2,5 millions de tonnes de carbone de l’atmosphère au cours des deux dernières années (années fiscales 2021 et 2022), économisé 1,3 million de mètres cubes d’eau sur l’année fiscale 2021, réduit de 18% l’utilisation de plastique à usage unique dans les emballages de ses produits.
Parallèlement, l’entreprise annonce avoir acheté 5,8 GW d’énergies renouvelables, dans 10 pays, sur l’année fiscale 2021 et donné accès à plus de 500 acteurs à son Planetary Computer qui accueille des projets de préservation de la biodiversité.
Pourtant tout n’est pas « vert » dans le paysage éco-responsable de l’entreprise. Cette dernière ne cache pas ses difficultés à réduire les émissions de sa supply chain, ce que l’on appelle dans le jargon « Green IT » les émissions de Scope 3. Si l’entreprise a réussi à réduire de 17% ses émissions de Scope 1 et Scope 2 notamment grâce à ses achats massifs d’énergies renouvelables pour alimenter ses datacenters, ces émissions de Scope ont quant à elles bondi de 23% ! En cause, l’impact notamment lié à la fabrication de ses nouvelles consoles Xbox Series X et S qui ont rencontré un vif succès (mais aussi de fortes pénuries obligeant à des livraisons à flux tendu notamment par avions).
Microsoft explique que « nos émissions ont eu lieu dans un contexte de croissance significative de l’activité en 2021. Au cours de cette période, nos revenus commerciaux ont augmenté de 20 %. Nous avons considérablement étendu l’empreinte de nos centres de données mondiaux pour répondre à la demande accrue de l’activité cloud de Microsoft et nous avons constaté une croissance des ventes d’appareils, en particulier de la Xbox et de l’utilisation associée, due en partie à la pandémie ». 23% d’augmentation des émissions de Scope 3 pour accompagner 20% de croissance des revenus, voilà qui n’est ni glorieux, ni rassurant.
Mais l’éditeur ne compte pas baisser les bras et plutôt intensifier sa lutte à de nombreux niveaux:
– En interne tout d’abord en restructurant sa taxe carbone interne pour encourager les différentes divisions à réduire davantage leurs émissions carbone et pour investir encore davantage dans l’élimination du carbone.
– En externe ensuite en travaillant avec ses fournisseurs dans le monde entier pour les aider à décarboniser leurs activités. Cela passera par l’élaboration de nouveaux outils de contrôle, des aides à l’investissement en technologies plus « green », et la sélection de fournisseurs à même d’améliorer ses émissions Scope 3.
– Enfin cela passe par des collaborations et des investissements. Microsoft a accordé une subvention de 100 millions de dollars à Breakthrough Energy Catalyst pour accélérer le développement de solutions autour de l’hydrogène propre, le captage direct du carbone de l’air, le stockage d’énergie à long terme et le carburant d’aviation durable. Et 471 millions de dollars (sur le milliard de dollars sur 4 ans promis pour son Climate Innovation Fund) ont déjà été alloués, notamment à LanzaJet, BlocPower et Eversource, pour accélérer le développement mondial des technologies de réduction et d’élimination du carbone.
Akamai, de vrais progrès mais pas assez de transparence
Akamai est un acteur majeur de l’Internet avec son réseau de rediffusion et de sécurisation des expériences digitales. « Au cours des deux dernières années, Internet est devenu une ressource indispensable pour nous tous, présente à chaque instant dans notre travail, notre vie, nos interactions, nos apprentissages et nos loisirs. Or, cet outil inévitable représente une part importante des besoins mondiaux en électricité », rappelle Nicole Fitzpatrick, Deputy general counsel et Chief ESG officer.
Akamaï s’est engagé à montrer l’exemple et s’est fixé comme objectif de fonctionner en 2030 avec 100% d’énergie renouvelable sur une plateforme 50% plus efficiente, de réduire de 100% les émissions de sa plateforme et de recycler 100% de ses déchets électroniques.
En 2021, la plateforme Akamai Intelligent Edge (qui représente 92% des émissions annuelles d’Akamai) a consommé 746 610 mégawattheures (MWh) d’énergie, soit suffisamment d’énergie pour alimenter environ 63 717 foyers ou environ 64 370 000 000 smartphones. Sur ces MWh, 373 100 MWh – soit 49,98% – proviennent d’énergie verte. Le défi pour Akamaï est d’arriver à de bons résultats partout dans le monde alors que sa plateforme est présente dans 4 000 villes. En 2021, 80% des sources d’énergie en Europe d’Akamaï étaient des sources d’énergie renouvelable. Mais de tels taux sont encore impossibles dans bien des pays du monde. En moyenne, à l’échelon mondial, Akamai affiche 50% d’énergie verte.
Akamaï progresse aussi dans sa volonté de rendre sa plateforme plus efficiente. Celle-ci est désormais plus efficiente de 28% (par rapport à 2020) malgré une augmentation de 60% des capacités. Et ses émissions Scope 2 ont été réduites de 47%.
En revanche, l’entreprise se montre beaucoup plus discrète sur ses émissions Scope 3, sur les défis qu’elle doit encore résoudre et sur ses propres échecs par rapport à ses ambitions (car il y en a probablement, ce n’est pas anormal). C’est dommage. Dans un monde où bien des entreprises sont encore en phase de réflexion sur ces sujets et en recherche de « comment faire », un peu plus de transparence sur les difficultés rencontrées de la part des précurseurs serait non seulement bienvenue mais aussi très utile.
Une vraie tendance, même s’il reste beaucoup à faire
Ces deux exemples doivent inspirer les responsables d’entreprises en France et partout dans le monde. Ils montrent que les grandes entreprises du numérique ne sont pas inactives sur le front de leur éco-responsabilité. Bien sûr, elles ne sont pas uniquement motivées par des fins philanthropiques, loin de là. Elles ont compris que ces efforts étaient critiques pour leur image – dans un monde où les consommateurs sont hypersensibles à ces sujets et où les entreprises doivent intégrer dans leur bilan carbone les émissions de leurs fournisseurs – mais aussi pour l’efficience de leurs processus (et donc pour réaliser des économies substantielles).
Néanmoins leurs efforts démontrent une volonté de plus en plus marquée de systématiquement adopter des comportements plus Green plutôt que l’inverse. Particulièrement dans l’industrie numérique. On constate une accélération et une généralisation de ces efforts… « Baby steps » diront certains… peut-être… mais des baby steps dans la bonne direction.
Scope 1, 2, 3… C’est quoi ?
L’Ademe (Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’énergie) encourage les entreprises à classer les sources d’émission carbone pour leur Bilan Carbone en trois catégories :
Scope 1 (émissions directes de GES) : couvre toutes les émissions directes de gaz à effet de serre émis directement par l’entreprise et provenant des installations détenues et contrôlées par l’entreprise : chauffage dans les locaux, émissions des véhicules détenus par l’entreprise, fonctionnement des datacenters, etc.
Scope 2 (émissions à énergie indirectes) : couvre les émissions FES associées à la production d’énergie (électricité, chaleur, vapeur) utilisée pour les activités de l’organisation : émissions générées par les processus de production, alimentation des datacenters, etc.
Scope 3 (autres émissions indirectes) : regroupe toutes les émissions indirectes produites par l’activité de l’entreprise et sa supply chain.
Sources:
– An update on Microsoft’s sustainability commitments: Building a foundation for 2030
– Akamai Sustainability Report 2021 | Akamai
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