Malgré des scandales à la répercussion énorme dans les cryptomonnaies, la blockchain pourrait tirer parti d’une diminution de son empreinte écologique. Quelques ONG devraient en profiter, explique Ayoub Lamrani Alaoui, Systems Engineer chez SAS France.

Mentionner aujourd’hui la technologie blockchain revient souvent à égrener la liste des scandales financiers à répétition liés aux cryptomonnaies. Ainsi, le procès de Sam Bankman-Fried s’est conclu sur un verdict qui fera date, le fondateur de la plateforme d’échange FTX risquant jusqu’à 100 ans de prison. Celui-ci est accusé de la faillite à 40 milliards de dollars de FTX. Or, avec ce scandale, on a aussi eu droit à l’effondrement de la cryptomonnaie Terra et à diverses actions en justice des régulateurs contre Binance et Coinbase, deux autres plateformes d’échange.

À bien regarder la chronologie et l’essence même des problèmes dans le monde des cryptomonnaies, quelques traits communs sont facilement identifiables. Fraude, incompétence, manque de supervision, manque de transparence et stupidité sont des qualificatifs largement partagés dans ces affaires.

Cependant, cela n’est pas suffisant pour remettre en cause le socle technologique de la blockchain. Cette technologie de stockage et de transmission d’informations sans autorité centrale tout en étant sécurisée est toujours novatrice.

En revanche, son empreinte écologique n’est pas anodine. Notamment avec les fermes de serveurs informatiques utilisées pour le « mining ». Rappelons que la technologie utilisée par la blockchain et donc par les cryptomonnaies repose sur deux concepts intimement liés : le « proof of work » (preuve de travail) et le « proof of stake » (preuve d’enjeu). Le « proof of work » consomme toujours énormément d’électricité, l’équivalent d’un pays comme la Finlande. À l’heure des bouleversements climatiques sur la planète et du souci d’économiser l’énergie, cela n’est plus acceptable.

Heureusement, de nouveaux protocoles développés notamment par la communauté Ethereum (cryptomonnaie concurrente du Bitcoin) et d’autres acteurs vont permettre de réduire considérablement l’empreinte écologique du « proof of work » et du « proof of stake ». On parle là d’une délégation de « proof of stake » voire de mécanisme de validation parallèle du « proof of work ». Au bout du compte, la consommation énergétique serait réduite de 99%. Là, on obtient un outil exploitable par le plus grand nombre, permettant dans certains cas de réduire le coût d’exploitation de certains services.

Dans ce domaine, les organisations humanitaires et caritatives sont en pointe. Ainsi, en décembre 2022 le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) a tenté une expérience pour distribuer des fonds à des réfugiés de la guerre en Ukraine. L’idée était de se baser sur l’USD Coin, une cryptomonnaie dite « stable » car adossée à une monnaie fiduciaire reconnue ou des actifs physiques, et de rendre les fonds disponibles via un smartphone. Un réfugié ne possédera pas forcément une pièce d’identité. En revanche, il peut posséder un smartphone et peut retirer de l’argent liquide dans diverses devises via le protocole de l’HCR et ses partenaires « pro-bono ».

De telles méthodes astucieuses peuvent être répliquées par différentes organisations non gouvernementales (ONG) qui distribuent des fonds. Avec la blockchain et la mise en œuvre d’un contrat intelligent (smart contract), elles peuvent assurer un excellent niveau de transparence sur l’utilisation des fonds des donateurs. Ces derniers seront certainement satisfaits de savoir que leur générosité ne sert pas à financer l’achat d’un hôtel particulier à Londres, à Paris ou ailleurs par la famille d’un dictateur.

Au-delà des ONG, les acteurs traditionnels de la finance s’intéressent toujours à la blockchain, en bonne intelligence avec les régulateurs. Hélas, tout ne se situe pas sur un même pied d’égalité. Pour faire simple, disons que les places financières de Singapour et Hong Kong sont en pointe sur le sujet, suivies par l’Europe dont la nouvelle réglementation MICA (Markets in crypto-assets) sera mise en œuvre en décembre 2024. En revanche, les Etats-Unis sont un peu à la traîne. Il est vrai que le procès FTX a de quoi doucher les meilleures dispositions. Pour le moment…
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Par Ayoub Lamrani Alaoui, Systems Engineer chez SAS France

 

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