L’informatique du secteur public est devenue un labyrinthe difficile à gérer. Face à une dette technique croissante, la Cour des comptes s’est d’ailleurs inquiété cette année de la fragmentation numérique de l’Etat. Mais paradoxalement, la solution pourrait venir de nouvelles technologies numériques et notamment de l’IA moteur d’opérations autonomes.

Dans le paysage en constante évolution des technologies de l’information du secteur public, la complexité est devenue un défi redoutable.

Des investissements technologiques bien intentionnés, comme les services cloud, destinés à moderniser les opérations publiques, créent par inadvertance des écosystèmes informatiques labyrinthiques difficiles à gérer et à sécuriser. Cet environnement compliqué n’est pas seulement un casse-tête opérationnel : il peut également devenir un obstacle à l’innovation. Pour relever ce défi, il faut une stratégie claire, une gouvernance rigoureuse et une coordination interministérielle sans faille.

Cet objectif a été abordé dans une étude de la Cour des comptes de juillet 2024 intitulée « Le  pilotage de la transformation numérique de l’Etat par la direction interministérielle du numérique  ». Le rapport de veille précise : « Les enjeux liés à l’intelligence artificielle et au numérique écoresponsable, dont l’implémentation est encore fragmentée et sur lesquels les initiatives sont soit foisonnantes, soit insuffisamment pilotées, mériteraient d’être confiés à la DINUM pour diriger les administrations et développer leur compréhension de ces enjeux. L’enjeu croissant de la dette technique des administrations est, tout comme la sécurisation des grands projets, un domaine dans lequel une approche globale semble indispensable. »

Le rapport exhorte les organismes publics à mieux coordonner leur transformation numérique et indique que la DINUM pourrait être responsable de l’ensemble de la transformation du secteur public. Pourtant, les responsables informatiques des administrations publiques sont confrontés à un paradoxe. Comment peuvent-ils accélérer la transformation numérique sans compliquer encore davantage la tâche de leurs équipes techniques ? De manière peut-être contre-intuitive, la réponse pourrait consister à intégrer davantage de technologies.

Le potentiel des opérations autonomes

En effet, un environnement informatique où l’intelligence artificielle (IA) et l’apprentissage automatique (AA) interviennent pour aider les professionnels de l’informatique à analyser, prédire et prendre des décisions est possible. Les équipes informatiques n’auraient alors plus à gérer les détails des opérations quotidiennes, ce qui permettrait de passer d’une gestion informatique réactive à une gestion informatique proactive. Grâce aux progrès rapides de l’IA, cette solution prometteuse, connue sous le nom d’opérations autonomes, pourrait bientôt se concrétiser. À terme, les opérations autonomes contribueront à garantir que l’environnement informatique, de l’infrastructure existante aux services cloud en passant par les bases de données, est toujours opérationnel.

L’observabilité est le fondement des opérations autonomes

Pour que les opérations autonomes deviennent une réalité, les organismes publics doivent d’abord privilégier l’observabilité. La technologie de l’observabilité ne se limite pas à des outils de surveillance traditionnels pour fournir une vue globale de l’ensemble de l’écosystème numérique d’une entreprise dans des environnements sur site, hybrides et multiclouds.

Selon Gartner, l’entreprise moyenne utilise 15 outils de surveillance. Cela contribue à la désensibilisation aux alertes et à la prolifération des outils. Avec un outil d’observabilité unifié, les équipes peuvent consolider les solutions de surveillance en place et recevoir des alertes plus intelligentes et exploitables.

Sur un écran unique, les équipes peuvent recevoir des scores d’intégrité et des informations sur les réseaux, les applications, les bases de données et les systèmes. L’observabilité permet aux professionnels de l’informatique de comprendre les dépendances entre des systèmes informatiques complexes afin d’identifier et de résoudre les problèmes plus rapidement.

Préparer l’avenir avec des opérations autonomes

Lorsque les entreprises ont davantage de visibilité sur l’environnement informatique, elles font un pas de plus vers des opérations informatiques totalement autonomes.

C’est tout à fait pareil quand on conduit une voiture. Une solution d’observabilité agit comme une aide au maintien de voie. Elle utilise l’intelligence pour prendre certaines décisions de manière autonome, mais nécessite toujours une surveillance et un contrôle humains. En revanche, les opérations autonomes s’apparentent davantage au système Autopilot de Tesla, qui utilise l’intelligence artificielle et l’apprentissage automatique pour sillonner les routes de manière autonome.

Dans un environnement informatique, les opérations autonomes permettraient d’automatiser les tâches de maintenance régulières et la résolution des problèmes, en traitant les problèmes avant qu’ils n’aient un impact sur les opérations. Si une base de données montre des signes de faiblesse, le système peut automatiquement allouer des ressources supplémentaires ou réacheminer le trafic pour maintenir les performances.

Bien que les opérations autonomes ne soient pas encore une réalité, et que certains professionnels de l’informatique surchargés de travail puissent les voir comme un fantasme, on commence à entrevoir un avenir autonome. Dans cet avenir, les équipes techniques passeront beaucoup moins de temps à identifier les problèmes et à y remédier, et plus de temps à se concentrer sur la stratégie et l’innovation.

En attendant, une solution d’observabilité alimentée par l’IA peut corréler les mesures et les événements, identifier les anomalies et réduire intelligemment les alertes. Cela permet aux équipes de comprendre les problèmes réellement importants afin de pouvoir les traiter rapidement. Les professionnels de l’informatique ont les moyens de se concentrer sur le développement de nouveaux produits et l’exécution d’initiatives commerciales critiques, sans devoir passer constamment d’un outil de surveillance à l’autre.

Une nouvelle frontière passionnante

Les opérations autonomes, qui font partie du nouveau chapitre de la gestion informatique, sont amenées à révolutionner les systèmes informatiques du secteur public. En adoptant dès maintenant l’observabilité alimentée par l’IA, les entreprises peuvent maîtriser les environnements informatiques complexes, améliorer la résilience et continuer à mettre en place la transformation numérique. Ces administrations avant-gardistes se positionneront de manière à tirer profit des opérations autonomes, en s’assurant qu’elles peuvent fournir des services publics essentiels pour les décennies à venir.
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Par Krishna Sai, vice-président senior de l’ingénierie, SolarWinds

 

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